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As-tu été à Tombouctou?

Tombouctou, capitale africaine de la culture (comme on dirait à Marseille, en ce moment)? Presque, dans la mesure où les menées islamistes ont veillé à détruire quelques trésors funéraires et autres tombeaux sculptés, sans compter des documents manuscrits, inestimables témoignages d’un monde culturel désormais (quasiment) disparu…La médiatisation forcée de cette ville malienne aura eu au moins un avantage, c’est de gommer peu ou prou la connotation très désobligeante qui s’attachait jusqu’alors à ce toponyme. Serait-ce en raison de son étymologie?

Car, après tout, que signifie Tombouctou? En fait, rien de désobligeant, au contraire: il s’agit tout simplement d’un nom de lieu (définition stricto-sensu de ‘toponyme’) qui décrit l’endroit en question, évidemment pas de nos jours mais à sa fondation…Une fondation profonde, puisque l’on a affaire à un terme «targui», singulier de « touareg » qui est en fait lui-même un pluriel; dans Tom-Bouctou, la première syllabe évoque un lieu où se trouve un puits (quel autre repère plus important dans le désert?); la seconde serait le nom de la femme présente sur le site en question*, dont les hommes bleus disent qu’elle était la gardienne du puits, lui donnant parfois une dimension sacrée. Telle est en tous cas la version indigène, qui affirme l’existence d’une cité au 11è siècle…

Mais, huit siècles plus tard, un explorateur allemand (personne n’est parfait) plaidera pour un mot issu de l’un des (nombreux) dialectes présents dans la zone, avec le sens de ‘le creux des dunes’, ou ‘le village abrité au pied des dunes’ **. Voilà de quoi aller voir là-bas si j’y suis, tant le nom fut autrefois synonyme de ’bout du monde’. En effet, au fil des époques, on expédia les gens indésirables ‘au diable’, voire ‘au diable vauvert (la vallée verte)’, puis chez les plou(c)s (le village, en breton); du temps des cathédrales, on connaissait même T(h)unis, mythique royaume du roi de la Cour du Miracles qui grouillait autour de Notre-Dame de Paris.

Au vingtième siècle, on nommera Mgr Jacques Gaillot ‘évêque de Parténia’, district symbolique du sud algérien, à l’opposé du très concret tunisien du sud Tataouine (les Bains, parfois), bagne de sinistre mémoire réservé aux récalcitrants des ‘Bat’d’Af’ (bataillons d’Afrique), autant dire des ‘bleds’ (pays) d’où l’on ne reviennait pas, ou si peu. On pensera aussi à en envoyer certains «chez les Grecs», ou, si vous avez le malheur de chanter en punk dans une église russe, «au Kamchatka» (au fin fond de l’ex-empire). Et si vous ne savez plus où donner de la boussole, choisissez Pétaouchnok ou Tartempion-les-Olivettes (comprenne qui pourra ce qu’elles viennent faire là). En résumé et en français dans le texte, tout çà, c’est ‘le trou du cul du monde’, en tout cas vu par un ‘civilisé’ de l’Occident, un trou dans lequel il ne devinait point l’insondable trésor culturel qu’il a si longtemps ignoré et sur la disparition duquel il lui sied de s’affliger aujourd’hui.

Un ami musicien me faisait remarquer que pour lui, au contraire, Tombouctou sonnait comme une séquence de frappe sur une batterie, avec ce rythme à trois temps impulsé par les deux ‘t’ et la répétition du ‘ou’. Tom-bouc-tou, tom-bouc-tou…il n’empêche, les chanteurs inspirés par cette ville n’ont pas failli au cliché, tel Alain Chamfort: «…prends tes jambes à ton cou, le train pour Tombouctou, là où tu passes, laisse pas la moindre trace…», et quelques chansonniers des années 50: «…As-tu été à Tombouctou?…» sur l’air de «As-tu été à Tahiti?», c’est dire!

Désormais, à l’instar de quelques medias un peu exaltés, c’est avec des accents gaulliens qu’il faudra citer le nom de cette ville; ‘Tombouctou outragée, brisée, martyrisée, mais Tombouctou libérée!’ (‘Une’ authentique d’un hebdomadaire africain).

(*) c’est la même idée que l’origine d’Abidjan (cf ce mot).
(**) pour l’anecdote (et les amateurs des plages d’Aquitaine), c’est exactement la définition étymologique de la ville de…Biscarosse, mais évidemment d’après deux racines celtes!


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