Chirac (Jacques)

«Son nom commence comme une caresse et se termine comme un coup de cravache»…Je sais, on avait dit ça de Marlène…«Dietrich», mais, d’un point de vue phonétique, l’effet est à peu près semblable, un patronyme qui claque comme un éclair sur le rocher d’une montagne corrézienne; forcément corrézienne.

L’ex-président de la République est pourtant né à Paris, mais il est clairement -qui pourrait l’ignorer- de souche provinciale, les deux côtés de sa famille étant localisés quelque part autour de Tulle, en provenance de plusieurs villages possibles…S’il existe plusieurs Chirac (et même Chirat) qui pourraient revendiquer être le berceau de ses ancêtres (au moins depuis depuis le 17ème siècle), on s’accorde en général sur le hameau de ‘Gros-Chastang’ (le gros châtaignier), quelques kilomètres à l’est de la-dite préfecture.

Il s’agit donc d’un nom de lieu, un toponyme hérité de la période où les Romains profitaient des (richesses) gauloises. Il faut alors probablement remonter à une étymologie qui combine une racine (chir-)+ le suffixe traditionnel disséminé dans toute la (déjà) ‘Nouvelle-Aquitaine’, ce ‘-ac’ des centaines de fois répandu du Limousin aux portes des Landes, et qui permettait de former un adjectif. Bref, le Chirac vient donc de Chirac, pour une fois ce n’est pas plus compliqué (et heureusement que Jacques était là, sinon vous n’oseriez même pas chercher ça sur une carte).

L’adjectif en question, avant que ne se manifeste un ‘ch-‘ presque auvergnat, était à l’origine beaucoup plus ‘sec’, sous le forme ‘cariacus’, autrement dit ce qui qualifiait (sous-entendu: le domaine de) Carius, un ‘nom de personne’ (si, c’est une catégorie étymologique). En quelque sorte donc, cariacus=chiraquien. Que le gars ait été gaulois comme on le prétend généralement et donc ‘autochtone’, ou peut-être romain comme cela arrivait quand un ‘occupant’ choisissait de rester dans le pays pour passer sa retraite, cela n’a pas l’air très important….

Sauf que, d’un point de vue linguistique, ‘carius’ ne sonne pas très celte, les noms ‘propres’ gaulois étant en général beaucoup plus gutturaux (influencés par les ‘invasions’ germaniques), et souvent terminés par la voyelle ‘o’ par exemple…Le problème, c’est que si ‘carius’ est vraiment une importation latine, il renvoie forcément à un homme ‘caries’ ou ‘cariosus’, pour vous citer les autres membres de la famille. La racine (si j’ose dire!) qui a donné…carié, ou carie -oui, celle de la dent-, soit, au sens premier, quelque chose de gâté, pour ne pas dire pourri, un chicot, quoi.

Heureusement, ce ‘caries’, appliqué à un lieu, pouvait aussi qualifier un ‘terrain pourri’, corrompu, le plus souvent desséché donc poussiéreux (ouf). Quand on parlait de vin par exemple, le Romain comprenait que ce breuvage était…éventé bien sûr. Peut-être, si l’on revient du côté des chemins de Brive-la-Gaillarde (*), fallait-il comprendre que l’endroit était impropre à la culture, trop caillouteux? D’autant qu’un mot emprunté au patois lyonnais vient ajouter à l’équivoque, puisque dans cette région (pas si lointaine, à la mesure des mouvements linguistiques), un ‘chirat’ désignait un éboulis de pierres…Malheureusement cette fois, la période actuelle de violence(s) a fait naitre un autre Chirac, ou plutôt « Chirak », aux Etats-Unis: en raison des nombreux meurtres qui se succèdent dans la capitale de l’Illinois, la presse américaine a surnommé la ville Chicago-Irak, rapidement abrégé en ce que vous savez!

Espérons que tous les Chirac ne me jetteront pas la pierre. Et n’auront pas une dent contre moi. Même étymologiquement.
NB: voir aussi la précédente chronique (fév.2011) sur Jacques Chirac, avec quelques détails et anecdotes complémentaires…

(*) tapez le nom pour connaître l’origine de ce surnom (chronique de 2010) et aussi ‘week-end à Tulle’ (2013) si vous voulez en savoir plus!

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