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pain sans chocolat

C’est quasiment la viennoiserie la plus ‘française’ que les étrangers associent à Paris et à la France. Café-jus d’orange-croissant, voilà qui constitue le menu du faux-petit déjeuner continental que l’on sert dans à peu près tous les bistrots. Et, si ce mot est à la Une en ce matin, c’est autant pour vous souhaiter un bon dimanche que pour relever le discours d’un certain homme politique qui va…croissant dans la surenchère, lorsqu’il plaint ces pauvres petits français dont on vole régulièrement le pain au chocolat à la sortie des écoles.

Pain au chocolat, forcément! Parce que le croissant, figurez-vous, c’est le symbole même de l’islam (avec la couleur verte), et donc pas question de se brûler avec le sujet, pâte feuilletée ou pas dans le four. Laissons donc tomber ce petit pain cher à Joe Dassin (1968), et intéressons-nous quelques instants à l’origine (controversée) de ce croissant dont l’étymologie en coin n’a rien de compliqué.

Car ‘croissant’, à l’origine, c’est évidemment le participe présent du verbe croitre (au fait, c’est quoi, le participe passé*?). Croitre, cela signifie grandir, évoluer, grossir, se transformer, en fonction de l’objet et du contexte concernés. Evitons donc de glisser sur les sacro-saints chiffres d’une ‘croissance’ économique si indispensable à notre malheur matériel, et arrêtons-nous un instant sur le croissant le plus évident, le plus magique, et le plus sacré pour nos ancêtres: celui de la lune; une lune qui croît et décroît au fur et à mesure des semaines, et qui inspirera d’abord la civilisation ottomane (pour schématiser, les Turcs), puis la religion ‘montante’ de l’humanité, l’islam, même s’il s’agit en fait du dernier croissant qui est figuré.

Symbole pour symbole, mieux vaut sans doute un quartier qui croît qu’une croix qui ne fait pas de quartier, mais c’est une autre histoire. L’emblème de l’islam ne sera d’ailleurs complet qu’après l’association du croissant avec une étoile (à cinq branches), forme également revendiquée par le judaïsme (à six branches), puis par une foule de pays dont les Etats-Unis (record battu) et l’Europe (je vous en mets une douzaine, çà ira?).

Un petit mot sur l’histoire, que vous connaissez déjà sans doute, de la viennoiserie en question. Qui précisément, s’appelle ‘viennoiserie’, ce qui suppose pour le moins une provenance autrichienne, et c’est là que çà gonfle: dans l’ordre chronologique des revendications, on trouve d’abord les Viennois qui, dit-on, font lever la pâte depuis plus de dix siècles, mais avec une simple pâte levée (le kipferl) et donc pas exactement avec le résultat que l’on connait de nos jours grâce à du feuilleté.

A la Renaissance, les Français soutiennent mordicus-croissantus que l’on servit à la table royale des croissants lors de rencontres entre François 1er et le Grand Turc (comme de par hasard). Deux siècles plus tard, on attribuera à…l’autrichienne Marie-Antoinette la vogue de ce gâteau importé par une jeune souveraine nostalgique de son pays, et pour laquelle ce croissant était donc en fait une madeleine.

La version la moins contestée -et peut-être redondante avec la précédente- évoque le second siège de Vienne (1683) par les têtes de turcs traditionnelles des polonais et des autrichiens, les Ottomans. Pour ne pas se faire remarquer, ces derniers auraient décidé d’attaquer la ville en fin de nuit, mais les boulangers, qui veillaient au grain, au four, et au moulin, alertèrent les soldats qui repoussèrent l’assaut. Pour commémorer la victoire, on dit qu’ils adoptèrent le symbole de l’ennemi musulman pour en faire la pâtisserie que l’on connait. (curieuse tradition, de piquer l’emblème du vaincu, mais si c’est vrai, on a eu chaud en 1945!)

Il faudra quand même attendre les toutes-premières années 1900 pour que les croissants garnissent les vitrines des boulangers parisiens, la recette définitive n’apparaissant dans les livres de cuisine que dans les années 1930. Voilà en tous cas une histoire bien plus glamour que le très ordinaire pain feuilleté engrossé d’une, puis de deux barres de cacao, probablement emprunté à une tradition provençale puis codifié par des artisans au milieu du 20è siècle. En résumé, si les Européens ont piqué le croissant aux Turcs, il ne faut quand même pas s’étonner qu’ils nous le reprennent de temps en temps, non? En tous cas, étymologiquement.

(*) Vous aviez bien entendu trouvé que le participe passé de croitre est ‘crû’, avec un circonflexe, obligatoire pour ne pas le confondre avec celui du verbe croire (cru). Et croyez-moi, quand une crûe (féminin du participe passé, justement) déferle dans une vallée, c’est bien parce que le niveau de l’eau a…crû rapidement; même si parfois on n’en…croit pas ses yeux.

NB: plusieurs internautes m’ont questionné à l’occasion de la disparition du cinéaste Claude Pinoteau, dont vous trouverez toute l’analyse étymologique dans l’article sur le nom du cycliste du Tour de France Thibaut Pinot (9 juillet 2012), dont il est un diminutif.


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Un commentaire au sujet de pain sans chocolat

  1. Pain au chocolat ou chocolatine ?

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