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émissaire (bouc)

Ou…Sénatorales, suite (et fin): à l’issue des élections éponymes, un homme politique faisant partie de l’ex-majorité (du Sénat) se plaignait d’avoir servi de  »bouc émissaire ». Or, ce monsieur sans barbiche (et donc sans bouc) ne se doutait pas qu’il saisissait là la plus pure analyse étymologique de son expression: bouc non, mais émissaire, sans aucun doute…

Le bouc vient de troupeaux et de siècles très éloignés, puisque le choix de l’animal fait référence à une tradition biblique, qui exigeait que l’on tuât non pas un mais deux boucs lors de sacrifices dit propitiatoires (pour se mettre bien avec Dieu): le premier, en général dûment préparé pour la cérémonie, n’avait aucune chance puisqu’immolé séance tenante; le second, pris au hasard dans un troupeau, était copieusement injurié, battu et imprégné de crachats et autres politesses rituelles censées lui faire porter, outre les cornes, le poids des fautes de la communauté. Après quoi, magie du transfert, on l’expédiait ad-pâturages désertiques où il ne manquait pas de laisser sa peau en même temps qu’il enlevait tous les péchés du monde, bien avant l’Agneau.

Or, comme vous l’aviez sans doute deviné, émissaire est de la même famille que le verbe ‘émettre’, donc forcément synonyme d’émission ou d’émetteur. Quel rapport alors avec la bestiole que l’on envoie crever dans le désert sans le moindre GPS? C’est tout simplement qu’il faut prendre le sens originel de ‘é-mettre’ au pied du sabot, car le verbe latin qui l’a émis ne signifie pas ‘mettre’ mais ‘envoyer’, et même envoyer au loin, et plutôt violemment. Jugez-en: émettre, chez les Romains, cela veut dire éjecter, tout comme un volcan crache sa lave, une fleur exhale son (lourd) parfum ou un maitre fait déguerpir un esclave en le virant de sa maison; l’image s’applique également à d’autres émissions, pas toujours diurnes et que vous trouverez tout seuls, ainsi qu’à l’expulsion…obstétrique, c’est dire si on est encore loin de la reconduite à la frontière, mais le sens -unique- est le même.

A ce moment-là, l’émetteur, ou l’émissaire si vous voulez, ce n’est donc pas celui qui envoie un message mais celui qui le reçoit (!), en général sous la forme d’un coup de pied au derrière pour l’expédier au loin. Curieuse conception de ce qui deviendra un jour la mission de certains émissaires, ambassadeur pontifical ou délégué spécial des armées, tous deux envoyés en…éclaireurs, probablement à grands coups de pompe et chargés de préparer le terrain avant la visite du patron, quitte parfois à jouer les boucs en question, puisque si émissaire il y a, c’est forcément pour l’envoyer au casse-pipe, en tout cas étymologiquement. D’où la saillie de notre sénateur répudié.

Faut-il terminer en signalant qu’il n’existe pas de parité -grammaticale, au moins- à ce bouc émissaire, donc pas de ‘chèvre émissaire'(même pour les sénatrices), sauf sur cette chaine de télévision d’information continue, qui, le week-end dernier, a rapporté la déclaration du sénateur dans un sous-titre libellé «émisaire». Et misère oui, sans aucun doute…


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