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Frigidaire

Pendant cette série qui ouvre l’année avec l’étymologie des grandes marques, je vous mets quelques noms de l’actualité au frais (1), il est donc normal d’aborder aujourd’hui le plus froidement possible l’histoire de cette invention dont le moteur génère souvent beaucoup de…chaleur, mais surtout d’erreurs de langage. Car, en réalité, ce dont il est question maintenant est le réfrigérateur, ‘Frigidaire’ devant en principe toujours s’écrire avec une majuscule puisqu’il s’agit d’une propriété commerciale. Ciel, Frigidaire serait-il le nom de son inventeur? Voilà qui ferait froid dans le dos (2)…

Tout le monde croit que l’invention est américaine, parce que, dans les années 1920, un industriel basé à Chicago a développé (et, comme toujours, il a su vendre) une idée géniale pour conserver les aliments sensibles bien au frais. Et si je dis ‘développé’, c’est qu’en fait on doit le principe à un physicien…français, lequel a mis au point, en 1685 s’il vous plait, un «procédé de vaporisation de gaz ammoniaque pour condenser l’air». Histoire de mettre le rhéostat sur le bon chiffre: à cette date, Molière est mort depuis quelques années, Jean-Sébastien Bach vient de naître, et Louis XIV est en pleine force de l’âge!

Il faudra quand même attendre deux siècles de plus pour que l’ingénieur Ferdinand Carré -encore un français- arrive à fabriquer réellement le «premier appareil de réfrigération à usage domestique», ce qui deviendra notre bon vieux ‘frigo’. Or, pour le moment, il ne s’appelle ni réfrigérateur, ni frigo (abréviation de frigidaire), car il n’a pas de nom, surtout pas ce ‘5 syllabes’ imprononçable en français. On est alors en 1860; l’invention est peut-être géniale, mais manifestement pas encore indispensable aux ménages, et la machine retombe dans l’oubli, pour ne pas dire en hibernation.

Arrive 1918, et un certain William Durant, citoyen américain comme son nom ne l’indique pas typiquement, retombe sur les plans du freezer pas encore branché. Sauf que cette fois, le Durant, c’est tout sauf un rêveur (notre industriel du début); la preuve: dans la grande ville du nord des USA, il est déjà patron d’un certain nombre d’entreprises dans la région, dont une petite boite qu’il vient de créer pour fabriquer des moteurs pour ‘véhicules automobiles’. Pas prétentieux pour deux sous, il l’appelle la ‘General Motors’, car elle peut construire des turbines pour un peu tout…Alors, pour l’engin à fabriquer le froid, il mobilise une partie des chaines de son usine, et commence à dépoter des «refrigerators», terme directement copié sur notre vocable académique national.

Il va sans dire que c’est ‘too much’ pour les commerciaux de la marque GM, qui refusent de vendre des ‘fridges’ totalement incompréhensibles pour un paysan de l’Illinois. Bon, d’accord, il faut simplifier, se dit Durant: après tout, un ‘réfrigérateur’, à quoi ça sert? D’abord et avant tout à refroidir…l’air; et s’il rend l’air-froid, on va donc l’appeler ‘frigid-air’, tout simplement.

Ceux qui vont se prendre un frigo sur la tronche, ce sont les Européens, qui se sont fait piquer le marché mais qui seront les premiers à voir déferler, dans l’Entre-Deux-Guerres, les curieux containers au look de placards de boucherie (plaquage en bois et poignées en métal à verrouillage), qui seront rapidement très utiles pour mettre au frais les canettes d’un soda importé qui suivra la même courbe des ventes…Remarquez, en France, on est quand même plus distingués: pour tenir les bouteilles au frais, nous, on appelle ça une cave. Sauf étymologiquement bien sûr.

(1)En cas de manque, relisez Trierweiler, déjà en archive depuis longtemps, en tapant le mot dans le champ de recherche en haut à droite.
(2)Rassurez-vous: la seule Frigid, c’est Barjot!


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