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Les Pictes

C’est le héros du jour; il s’appelle Astérix et pas Phénix, mais renaît de ses cendres (temporaires) par l’imagination et le coup de crayon de deux nouveaux compères très doués pour faire des bulles. Le premier mérite de ce nouvel opus ne sera pas moins d’avoir provoqué l’étonnement -et parfois la curiosité- d’un certain nombre de lecteurs devant ce gentilé inattendu: les Pictes! On a déjà envoyé le petit moustachu et son depardiesque acolyte chez les Goths, chez les Normands, chez les Bretons, chez les Helvètes ou chez les Belges, mais (comme vous avez déjà vu la couverture sur tous les medias) pourquoi diable les porteurs de jupe à carreaux s’appellent-ils pictes?

Sans entrer dans les détails complexes de la tumultueuse histoire de la Brittonie (future Bretagne grande, n’est-il pas?) et de ses voisins, vous avez constaté que le Pictland (ou Pictavia) correspond à ce que nous appelons aujourd’hui l’Ecosse. On a trouvé les premières traces de la racine ‘picti’ dans des écrits du 3è siècle après Jules César, pour qualifier une tribu installée au pays des lochs sous le terme «d’hommes peints». Le mot semble effectivement très fidèle au sens dérivé du verbe latin ‘pingere’, qui signifie peindre; la langue française en a d’ailleurs gardé, sous sa forme initiale ou pas, les mots de ‘peinture’ mais aussi ‘pictural’, ‘pictogramme’ et autres abréviations informatiques en ‘pics’ pour désigner un fichier-image.

De là découlent deux questions: pourquoi ces hommes étaient-ils désignés comme ‘peints’ (sans déflorer le sujet de l’album) et surtout, était-ce un nom donné par les Romains ou antérieur à leur arrivée, car les futurs écossais étaient là bien avant que les troupes de Jules n’essaient de venir faire trempette avec Nessy (sans d’ailleurs y parvenir). Toujours est-il que, quelques siècles plus tard, les Pictes se mélangent avec les Gaëls et quelques autres Anglo-Bretons du sud, et tout ce petit monde va former le ‘Scotland’, le territoire des Scots, encore un groupe du monde celte.

Ce sont justement les Gaël(ique)s qui auraient créé le son ‘scuit’ pour se moquer de leurs voisins ‘scots’, sans que l’on sache très précisément que ce signifiait ce bruitage, repris sans vergogne par les Romains qui vont le transformer en Scotti, mot sur lequel vont s’appuyer à peu près toutes les langues pour parler des Ecossais…sauf le français, qui va ‘fabriquer’ un ‘e’ en préfixe (comme souvent devant un ‘s’: school devient é-cole; squirrel, é-cureuil, etc). Nous voici donc avec des écossais qui n’ont rien à voir avec les petits pois, qui sont, eux, écossés (dont on a enlevé la cosse). Ne souriez pas, j’ai entendu des gens qui m’ont garanti que les petits pois venaient d’Ecosse pour cette raison…

Par contre, ce qui est vrai, c’est que les écossais sont de bons danseurs (la Scottish ou Scottiche en français sera une danse sautillante comme le folklore écossais, au début du 20è siècle), mais surtout de bons éleveurs de Scottie, nom générique d’un petit chien (parait-il découvert dans la région, toujours du temps des Romains) au long poil qui pend comme un tartan effiloché, et à la moustache toute britannique. N’oublions pas l’adjectif anglais ‘scotch’, lequel, outre évoquer un whisky dont on ne saurait contester le savoir-faire aux descendants des Pictes, servira un jour à baptiser un ruban qui leur collera définitivement une réputation de radins, surtout à cause d’un…américain.

L’histoire se passe dans les années 1920, et un industriel du Minnesota (l’un des 3M de son entreprise) fournit aux carrossiers de la région un ruban qui permet d’égaliser les tons de peinture; or, le rouleau n’adhère que sur de fines bandes latérales, ce qui fait croire aux ouvriers que c’est par mesure d’économie que l’on a rogné sur les enduits, d’où cette réputation; alors, forcément, le papier en question va devenir ‘Le scotch’, dont les amorces de rouleau garderont très longtemps un petit carré écossais en carton pour tirer la première coupe!

Pour terminer, revenons un instant sur l’étymologie ‘picturale’ sur laquelle se jettent comme un seul homme tous vos dictionnaires (en ligne, surtout) au sujet de ces Pictes. Quelques historiens latins, mineurs certes, ont donné à ce surnom le sens non pas de peindre mais de ‘dé-peindre’ (une situation, une ambiance), ce qui en ferait le qualificatif de peuples habiles à décrire ou à raconter des histoires. Il faudrait alors imaginer des gens davantage portés sur la transmission orale des légendes (celle d’un serpent monstrueux dans un lac, par exemple) que sur le body-painting préhistorique. Compte tenu du caractère écossais, voilà qui semble presque plus convaincant, à un détail près: cela fait une sérieuse concurrence à un certain barde gaulois nommé Assurancetourix!


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