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Orages

C’est la Une de quasiment tous les journaux, quels qu’ils soient. Entre des chats parisiens qui courent sous les grêlons, les dérapages verbaux d’un vieillard, et les minutes interminables du décollage en direct d’un avion de footballeurs, l’actualité a agacé plus d’un de nos lecteurs, probablement nouveaux puisqu’ils me demandent l’étymologie de ce simple nom commun: orage. C’était déjà la grande surprise au mois de juillet dernier (ciel, il pleut en été!). En voici donc une ‘rediffusion’ que vous aurez plaisir, je l’espère, à (re)lire.

« Orages, Ô désespoir(s), ô tempête ennemie,
Ne pouvons-nous rester au sec et à l’abri,
Et malgré le montant que nous avons payé,
N’avons-nous pas le droit au soleil assuré?
Ce mec, qu’à la télé toute la France écoute,
Ne peut donc empêcher de tomber tant de gouttes,
Et devons-nous un jour retourner à Paris
Sans avoir pu sécher nos vêtements flétris?»

Pas sûr que le phénomène eût accablé le vieux Don Diègue: oui, en France, il pleut l’été! Et parfois même, il grêle, scandale dans notre monde moderne où l’orage n’est pas censé s’accompagner de tonnerre, d’éclair(s), voire de foudre. «C’est l’Apocalype!» a-t-on entendu dans la bouche de tous les vacanciers réveillés dans leur sommeil estival, avec la même formule d’ailleurs que celle choisie par les journalistes quelques heures plus tôt pour parler de la ‘catastrophe’ ferroviaire de St Jacques de Compostelle, elle-même déjà largement éculée à Brétigny-sur-Orge…Dieu merci (si l’on ose encore dire), personne n’a trouvé de mot plus terrible que cette apocalypse (biblique, et totalement employée à contre-sens); mais il est à parier que si la pluie se maintient plus de trois jours, ce sera sans aucun doute le ‘Déluge’.

Le mot du jour est donc ‘orage’, sur la définition duquel je ne vous apprendrai rien, si vous êtes sûr de ne pas le confondre avec tempête ou ouragan, nuance. D’autant plus que, d’un point de vue étymologique, cet orage n’a rien, mais alors rien du tout, à voir avec le sens que nous lui donnons aujourd’hui: je suppose que le mot évoque pour vous une certaine violence du vent et de la pluie (le ‘déchainement des éléments’ comme disent les télés)…En fait, c’est tout le contraire, car le mot -contrairement à l’habitude où le sens s’appauvrit en général avec les siècles- a pris une force inattendue.

Car en remontant le temps chronologiquement, on trouve assez peu d’orages (le mot, pas le phénomène évidemment) avant le…16è siècle, et pour cause: entre cette date et le début du 12è siècle, un ‘orage’, c’est…une douce brise, pour ne pas dire simplement le souffle du vent, plutôt version alizé que bourrasque. Les responsables en sont les romains, auxquels le français du moyen-âge a emprunté le terme de ‘aura’, autrement dit un vent doux et léger, allant même jusqu’à désigner, au sens figuré, un ‘souffle éthéré’, en l’occurrence celui de la vie qui s’exhale d’un corps! Comme vous le voyez, pas de quoi faire fermer le camping de Lacanau-Océan. Alors, comment est-on passé de ‘au-ra’ à ‘o-rage’? Tout simplement par la phonétique, grâce à la proximité des deux sons. Curieusement, ‘aura’ est bien passé par l’étape ‘ourage’ avant de devenir ‘orage’, mais n’a cette fois rien à voir avec un ‘ouragan’ (y compris d’un point de vue météorologique).

Ouragan vient d’un mot espagnol (huracan), qu’on pourrait soupçonner d’être néanmoins une version de ‘aura/oura’+ un suffixe. Pas du tout: au 16è siècle, en Méditerranée, on ne connait pas d’ouragan(s), au contraire de l’archipel des Antilles (nouvellement colonisé) où l’on parle d’uracan’ dans un dialecte local. Les hidalgos ramènent donc ce mot ‘indien’ en Europe en le réécrivant à la sauce latine, soit ‘uragan’ puis ouragan…Les futurs américains eux, resteront presque fidèles au terme initial, en créant un ‘hurricane’ à l’anglaise, et le tour est joué. Chacun le sien, l’imagination ne manque pas de souffle. Alors, la prochaine fois que vous verrez un orage arriver, dites-vous bien qu’il ne s’agit que d’un doux moment à passer. Au moins étymologiquement.


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