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Dessange (Jacques)

Rendons à César ce qui appartient aux rédacteurs en chef de quelques médias créatifs: en même temps que l’accroche « le show Goshn » (pour…shogun évidemment) à l’occasion de la conférence de presse en mondovision de l’homme échappé du Japon (1), on a pu lire et entendre dans quelques organes de presse: « (désormais) c’est le coiffeur des anges » pour saluer la disparition du figaro le plus parisien des stars.

Or, il est né en plein centre de la ‘bonne France’ comme disaient certains de nos écrivains nationalistes du 19ème siècle, à savoir un Loir-et-Cher où « ces gens-là n’font pas d’manières (2) »; mais son patronyme est aussi équivoque que le sexe des créatures dont il semble porter le nom. Car il est très facile et combien tentant d’y voir spontanément une agglutination (un collage) de ‘des-anges’, ce que la phonétique se fait un plaisir de confirmer…

Seulement voilà, il y a aussi l’orthographe, qui n’aurait en l’occurence aucune raison d’oublier un ’s’ final (regardez bien). Bon, dans la catégorie ‘Bénis des dieux’, c’est vrai qu’il existe des Delange, surnom effectivement formé sur de-l’ange et créé pour suggérer une naissance ‘inattendue’, pour ne pas dire surnaturelle (l’histoire d’une femme qui se retrouve enceinte sans avoir ‘conçu’ a toujours eu beaucoup de succès).

Mais ici, point de pluriel, au contraire d’un homonyme néanmoins réel qui est Desanges avec un seul ’s’ central, véritable allusion (parait-il) à un descendant des…Ange (ouf!), prénom de formation médiévale dont la Corse semble être le coffre-fort moderne (et pas toujours rassurant); dans ce cas, il faut le plus souvent y voir soit un hypocoristique (un surnom affectueux) accordé à un nouveau-né beau ou sage ‘comme un angelot’, soit un nom de provenance qualifiant celui qui est né au (ou qui a hérité du) ‘domaine des Ange’, forcément donc sans ‘s’.

Exit donc pour Jacques l’hypothèse des volatiles du Paradis, dont vous trouverez facilement qu’ils doivent leur titre à un verbe grec qui signifie ‘annoncer’, les Evangiles (ev-ange-iles, en v.o) signifiant les (ou La) bonnes-nouvelles annoncées par le Christ et racontées entre cinquante et cent ans plus tard dans les livres éponymes…

Voilà donc une situation idéale pour susciter des interprétations linguistiques diverses et, comme toujours, suffisamment intellectuelles pour chercher à couper les cheveux en quatre sur ce mot. Comme par exemple imaginer dans ‘De sange’ une déformation ‘d’ensange’, terme abandonné qui définissait une unité de surface agricole parce que formé sur l’adjectif latin ‘encianga’, enceinte (pas d’un ange, une véritable palissade ou haie autour du champ en question).

Autre hypothèse moins tirée par les plumes, une variante de Dessauge (qui n’a jamais trouvé un ‘u’ écrit comme un ’n’ sur un document?) devenant alors une déformation de ‘sauge’, soit le saule dans la région lyonnaise. L’endroit où pouss(ai)ent des saules, c’est effectivement un axe de toponymes recevable, sauf à considérer, encore, qu’il n’y avait là qu’un seul saule (mais alors, pourquoi cet article au pluriel?).

Tant qu’on est dans les déformations sonores (et toujours possibles), mentionnons un Dessainge qui ne souffre que d’un ’i’ supplémentaire et qui malgré les apparences n’a strictement aucun rapport avec le moindre chimpanzé mais avec les excès de la table (3). De plus, en cas de grand débordement gastrique, signalons qu’il a existé un verbe ‘essanger’ en ancien-français, une opération d’essange consistant à décrasser un linge (trop) souillé avant de le savonner (en français moderne: touche ‘prélavage’…).

Tout cela a l’air bien loin de l’origine de la majorité des Dessange (enfin!), originaires de Moselle et plus spécialement du petit village…d’Hessange (Essinge, depuis le 12ème siècle), à peine une centaine d’habitants au dernier recensement (1810!) et donc actuellement rattaché à la commune de Vigy, tout près de la frontière luxembourgeoise. Le patronyme serait alors la francisation d’(H)essenge en dialecte lorrain ou d’(H)essingen en parler germanique, l’un et l’autre nous dispensant donc d’y chercher un ’s’ avant enregistrement royal puis républicain par l’Etat-civil parisien centralisé.

Et pour trouver le clin d’oeil final (presque) traditionnel, il faut aujourd’hui se tourner vers le prénom de notre ‘coiffeur-décoiffeur’, qui est en réalité non pas Jacques mais…Hubert. Je ne peux pas vous dire pourquoi il a dû en changer (il fut un temps où le son du mot avait une connotation péjorative, mais…). Par contre, on sait sans erreur qu’Hubert vient de deux racines germaniques (hug-berth), l’une évoquant l’intelligence et l’autre la célébrité ou la renommée. En dehors d’être également devenu le patron des chasseurs (de stars?), Hubert offre donc de belles garanties pour la postérité, y compris étymologiquement!

(1) voir si besoin le récent article à lui consacré dans ces colonnes.

(2) Michel Delpech

(3) Voir l’article sur ce nom ‘Bizarre’ dans la série spécialement consacrée aux patronymes ‘spéciaux’


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