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Bouygues Télécom

Le mot du jour est un célèbre patronyme qui se retrouve à la Une de l’actualité pour des raisons de…téléphonie, le groupe fondé par Francis étant, comme vous le savez, une entreprise de bâtiments et travaux publics (et, accessoirement, de télévision). Le nom de la dynastie de ces bâtisseurs d’empires (en pire?) permet de découvrir une étymologie intéressante qui semble, une fois encore, quasi-prédestinée aux activités de base de ce géant industriel qui fait actuellement l’objet d’une offre d’achat.

Contrairement à la généalogie récente de la famille (à la faveur de divers mariages), le mot est originaire du Grand Sud. A l’origine, il y a un terme latin (bodica) qui va s’implanter en occitan sous la forme ‘bosiga’. Enfin, quand je dis implanter, ce n’est pas sans certaines difficultés, car ‘bodica’ désigne un terrain de mauvaise qualité qu’on laisse le plus souvent en jachère, et qui va devenir assez rapidement une friche. Pourquoi un tel succès linguistique? Il faut garder présent à l’esprit que, pour les générations encore peu lointaines (et a-fortiori médiévales) de la France agricole, la situation, la surface et la nature des terrains arables étaient de première importance. Et, assez souvent, le propriétaire des lieux ou celui qui les exploitait ont écopé comme surnom de l’adjectif qui qualifiait le foncier en question.

C’est ainsi que cette racine va faire souche (hélas pour la terre) dans les pays de langue d’oc; on peut même suivre à la trace ses différentes variantes à travers les parlers des régions: du ‘nord’ au sud, on commence par les Bouygues de Corrèze ou du Cantal, puis les Bouyge ou Bouyges de Corrèze encore ou de Dordogne, et les Bouigue(s) de Gironde et de Haute-Garonne. En arrivant à nos frontières naturelles, le mot se charge d’un ‘s’ patoisant, pour faire Bousigue(s) en Ariège et dans l’Hérault, et enfin Bouzigue(s) dans le Gers et le Gard. Il existe même des formes plus rares comme le diminutif Bouziguet (le petit coin de terre inculte) ou Boudigue (boudiou!). Voilà qui permet de passer de Martin (Bouygues, successeur de son père) à Alain (Bouzigues, le très gay employé du service informatique de «Caméra Café» sur M6), qui sont donc cousins via de lointains ancêtres arracheurs d’herbes parasites.

Et justement, terminons par quelques autres mots de la langue française qui ont également trempé dans des histoires de champs abandonnés; malheureusement pour leur exploitant, le sens va assez souvent passer de celui de ‘mauvais terrain’ (naturellement) à celui, par transfert, de ‘mauvais cultivateur’! C’est le cas des Friche ou des Frichou, en langue d’oïl; ou, pour rester dans le sud, des Artigue, Lartigue, Lartiguau et autres Dartigaud, tous dérivés de l’occitan ‘artiga’ (une friche). Même démarche évidemment pour tous les lieux, lieux-dits et communes appelés Artigues, ou Artigues de quelque chose.

Du coup, on peut composer la racine avec d’autres termes, afin de préciser la nature ou l’état de la friche: les Artiguenave concernent une ‘nouvelle -nave- friche’; au contraire des Artiguevieille ou Artiguebielle (alternance v/b); ou encore les Artiguelongue, qui ont la malchance d’avoir une grande parcelle inutilisée. Le moins bien loti est sans doute le très sonore Bouffartigue (bouffe-artigue), assez répandu dans le Sud-Ouest et non pas en Provence comme on pourrait le croire, surnom probable d’un pauvre paysan qui n’avait à manger que des artigues, des racines et des cultures mal poussées.

Voilà qui devrait apporter du (mauvais?) grain à moudre au candidat au rachat: est-ce bien la peine de dépenser 10 milliards d’euro (le montant de l’offre) pour se retrouver avec de mauvaises herbes? En tous cas étymologiquement.


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