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Cadum

Pour terminer cette (première) grande quinzaine sur l’étymologie des marques, nous allons passer un savon à quelques souvenirs, peut-être réservés aux plus anciens. En effet, il y a quelques années (disons, presque un siècle!), l’une des visages les plus connus du pays se trouvait sur les murs, avec deux particularités: d’une part, ce n’était pas une affiche mais bien souvent une peinture; d’autre part, ce n’était pas une photo (vu l’époque), mais un dessin. Un dessin représentant un beau bébé blond et joufflu, riant dans un bain plein de bulles, grâce à un savon appelé “Peau Douce”…Vous y êtes? Le savon en question est le produit-phare de la société Cadum, dont le nom a traversé le temps pour une ou deux raisons assez inattendues, et qui n’ont rien à voir avec la toilette corporelle.

L’histoire commence en 1906, quelque part en Provence. Un industriel américain est en vacances avec toute sa famille, et, à l’occasion d’un détour dans un village de l’arrière-pays, Mr Mickaël Winburn découvre une variété locale de savon, un produit doux et lavant qui ressemble davantage à un baume qu’au célèbre cube ‘de Marseille’ (qui n’existe pas encore). D’ailleurs, ce produit, on ne le trouve qu’en pharmacie, sous le nom d »huile de cade’. Le cade, en provençal, c’est le nom du genévrier, cet arbuste à la sève amère et aux petites baies mauves, qui donnent au savon une douceur d’amande si particulière.

On est alors en pleine période de développement industriel, et le bonhomme, qui a oublié d’être idiot, imagine de mélanger le cade aux pains de savon grossiers généralement mis en vente. Coup de génie: il prolonge ses vacances, dépose un brevet, remonte vers Paris, s’installe en banlieue et crée une usine de fabrication, pour laquelle il cherche un nom qui fasse ‘dans le culturel’, tout en décrivant les propriétés de la plante; il utilise donc le mot qu’il a entendu en Provence (cade) auquel il rajoute une terminaison latine (-um), histoire de faire sérieux. Ainsi nait la société Cadum, l’un des atouts de la Douce France!

Seulement voilà, il ne s’agit pas seulement de produire à la chaine, il faut com-mu-ni-quer. En ces temps-là, pas de spots radio et encore moins télé; on s’en sort avec des ‘réclames’ dans les journaux, et encore, sans photo ou presque. Mr Winburn décide néanmoins qu’il faut trouver un emblème à sa marque: loin de montrer un savon qui mousse, il veut exprimer la douceur du résultat sur la peau, et, dans ce domaine, quoi de mieux qu’une ‘peau de bébé’? Il confie donc à un peintre de Courbevoie, un certain Arsène-Marie Le Feuvre, le soin de peindre un visage d’angelot souriant et d’y rajouter quelques bulles. Or, il se trouve que notre artiste francilien est très copain avec la célèbre danseuse…américaine en tournée en Europe, Isadora Duncan; laquelle passe régulièrement dans l’atelier accompagnée de son adorable petit garçon…

Vous avez deviné: le bambin devient illico l’archétype du ‘beau-bébé’, avec un succès tel que la société Cadum pourra créer, en 1924, le «Concours du plus beau bébé», manifestation qui sévira pendant de nombreuses décennies, pour le plus grand plaisir de mamans jalouses de leur progéniture parfaite (sans garantie dans le temps). Consécration suprême pour une marque: l’expression bébé-cadum va devenir un nom commun et s’appliquer, dans le langage courant, à tous les petits enfants adorés par leur famille (forcément); mais, le temps passant, le terme va perdre un peu de sa valeur positive, pour désigner d’abord un adolescent joufflu et un peu attardé (dans sa puberté), puis un adulte au visage enfantin et souvent benêt.

Mais la plus inattendue des interprétations est encore en vigueur dans le monde…politique, car il paraît que l’expression sert aujourd’hui à qualifier les députés novices qui entrent pour la première fois à l’Assemblée Nationale! Généralement, en guise de baptême, ils commencent d’ailleurs à se faire passer un savon. Presque étymologiquement.


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Un commentaire au sujet de Cadum

  1. Non, ce n’tait pas le premier BB Cadum.
    Par avec AFP
    Le 24 juin 2017 à 11h57
    C’est un mythe qui s’est éteint. Un mythe devenu une expression populaire. Maurice Obréjan, premier lauréat du concours «Bébé Cadum» du plus beau bébé en 1925 et ancien résistant, est décédé à Paris à 92 ans, selon un avis de décès publié ce samedi dans Le Figaro par le président et le bureau des Amitiés de la Résistance. Il était le parrain d’honneur de cette élection toujours organisée par la marque de produits cosmétiques.

    Juif français déchu de sa nationalité, résistant à 17 ans, il avait été arrêté en 1942 et déporté avec toute sa famille. Il en avait été le seul rescapé.

    Héros de la résistance
    Né d’un père roumain et d’une mère polonaise, il a vécu une enfance pauvre, aidant ses parents sur les marchés. «Mes parents m’ont inscrit car tout le monde disait que j’étais un beau bébé. La chance a fait le reste. Même en déportation, mes compagnons d’infortune m’appelait « Bébé Cadum ». Malgré les circonstances, j’étais la star…», confiait-il en 2010.

    Décoré plusieurs fois pour des actes de résistance, cet ancien directeur commercial a raconté son parcours dans «Un homme trois fois Français», paru aux éditions du Petit Pavé. «Une histoire qui échappe à la règle générale : celle d’un petit garçon qui a été « le plus beau bébé de France », le bébé Cadum des années 30 qui souriait avant la guerre sur nos panneaux d’affichage. Et on imagine mal que ce bambin qui a fait sourire la France entière ait pu un jour être le numéro 178177 d’un camp de la mort, au temps de l’holocauste», résume l’éditeur sur son site.

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    L’inhumation de Maurice Obréjan aura lieu lundi à 14h30 au cimetière du Père-Lachaise à Paris.

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