Connemara

…ou plutôt dans les lacs d’Irlande, ceux de la désormais célèbre région du Connemara. Exit la solitude du lac Majeur (1) ou l’emblématique jet d’eau du Lac de Genève (2), voici donc le retour du Connemara, par la grâce d’une ‘montée en épingle’ médiatique caractéristique du vide estival (choisi). Même si vous n’êtes pas coutumier des fins de soirées avinées, vous ne pouvez pas ignorer le martèlement obsédant du rythme musical que la chanteuse Juliette Armanet a eu la mauvaise idée d’égratigner (3).
« La polémique, c’est bon pour le tourisme, coco », cette querelle des modernes et des has-been va probablement générer quelques nuitées supplémentaires dans l’Ouest irlandais aux prochaines vacances et une ressortie inespérée dans les bacs du titre en question, sans parler de la publicité connexe pour les nombreux bars et pubs aux couleurs du trèfle. Or, il est surtout question de mer…
Connemara (ou Conamara en v.o et en orthographe moderne) est évidemment un terme construit à partir des racines celtes issues des multiples langues de cette zone; à l’origine de cette création, il y a la mythologie irlandaise qui met en avant une famille ‘Con Mhac’, que certains linguistes traduisent par ‘fils (descendants) du Chien’, ce dernier mot étant à prendre au sens du symbole de la lignée et non de l’animal proprement dit.
D’autres analysent ce ‘Con’ non pas comme une marque de filiation mais comme une syllabe d’influence germanique évoquant l’audace et/ou le courage, notion que l’on retrouve dans d’autres patronymes comme (O’) Connell, Co/unnigham, et l’inénarrable Con(n)an bien que barbare (4).
Dans tous les cas, vient se rattacher un second mot (‘mara’) qui forme alors l’expression ‘Con Mhac Mara’, contractée en ‘Conmaicne Mara’ puis francisée (entre autres) en Connemara. Les lacs se trouvent donc sur un territoire autrefois occupé par une tribu irlandaise (5) qui a donné son (sur)nom à de nombreux sites; faut-il prendre ‘Mara’ au pied de la vague comme ‘la zone située au bord de la mer’ (par où seraient arrivés les occupants) ou tout simplement comme l’image des…’mares’ (les lacs)?
Toujours est-il que cet endroit du monde a fait rêver ou intrigué suffisamment d’auteurs littéraires (Michel Déon, Hervé Jaouen) ou de cinéastes (John Ford) pour y situer les décors de leur oeuvre. Curieusement, le film « La taverne de l’Irlandais » interprété par John Wayne se déroule à…Hawaï, contrairement à « l’Homme tranquille » logiquement tourné sur les terres de naissance de l’acteur, de son véritable état-civil Marion Robert Morrison, lui-même authentique descendant d’immigrés irlandais et écossais.
N’oublions pas que, à côté des nombreux moutons et des troupeaux de lacs de cette pointe occidentale du continent, les ‘connemaras’ (nom commun) sont devenus la marque d’une variété de poneys; lesquels n’ont pas encore été l’objets de jeux de mots ou de commentaires de la part d’une ‘Armanet’ que tout poussait à la bagarre puisque les racines proprement germaniques de son nom (hari, l’armée + mann, l’homme) s’appliquèrent dès le 11ème siècle à des soldats particulièrement belliqueux; tout comme pour un certain Armani (italien) qui se battit dans la mode. Au moins étymologiquement
(1) ‘Il neige sur le Lac Majeur’, tube de feu Mort Schuman (1972)
(2) ou Léman, si vous êtes chauvin…
(3) A quand la critique littéraire de ‘La danse des canards’?
(4) Pour davantage d’exemples, voir l’article sur l’acteur Matthew McConaughey (mars 2021)
(5) Et même beaucoup de familles si l’on en croit le déferlement des patronymes listés dans la chanson!
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