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Dehaene (Jean-Luc)

En hommage à nos lecteurs d’Outre-Quiévrain de plus en plus nombreux, et surtout au Premier Ministre d’un Royaume qui vient de lui consacrer des funérailles nationales, coup de chapeau à cet homme politique belge d’origine toute française (il est né à Montpellier et mort dans le Morbihan), sauf étymologiquement. En effet, familier du vocabulaire flamand ou pas, voilà un patronyme qu’on ne peut pas confondre avec de l’occitan mais dont l’analyse facile permet de rappeler quelques notions simples d’onomastique.

D’abord, et contrairement à ce qui peut se produire assez souvent en linguistique, il est évidemment hors de question de chercher à comprendre le mot comme s’il s’agissait de phonétique francophone: il ne s’agit pas ici ‘de haine’ -cela va sans dire mais sans doute mieux en le disant- sauf peut-être à comprendre que le nom est un toponyme (un nom de lieu ou de provenance), et qu’il résulte bien d’une ancienne forme ‘de-haene’, en deux mots dits ‘agglutinés’. Ne reste plus qu’à déterminer, une fois que l’on aura compris la racine principale (haene), quelle est la nature de la préposition.

En effet, s’il s’agit bien d’un nom de provenance, le surnom d’un ancêtre qui ‘venait de’ (quelque part), on peut le rapprocher d’un terme germanique qui est ‘han’ (ou ham, possiblement déformé en haen en néerlandais), et qui désigne un site inondé par une rivière, en général à l’occasion d’un méandre qui déborde dans une zone cultivée. La préposition ‘de’ prend alors le sens de provenance, façon traditionnelle de nommer une personne qui vient ‘du-bois’, ‘de-la côte/coste’, ‘desmarais’, etc…Quelques références de lieux-dits ou villages de la région de Namur semblent conforter l’hypothèse.

Mais, pour des raisons techniques et peut-être socio-historiques, il y a en fait davantage de chances pour que ce ‘haene’ soit issu d’un ‘haan’ typiquement flamand, soit cette fois le nom du coq, ce qui fait des De haan, De Haene et Dehain(n)e les malheureux possesseurs d’un surnom quelque peu moqueur, le qualificatif devenant alors celui d’un ‘petit coq’ (en français: coqueteau, puis…Cocteau*), autrement dit un homme qui parade fièrement devant les poulettes, rien à voir donc avec des qualités vocales au petit-matin (**). Pire encore, dans certaines fêtes de provinces du nord de l’Europe, le ‘coq’ a été personnifié par un costume aux couleurs criardes -comme les plumes de certaines races du volatile- symbole de la folie ou même de la perversion (sexuelle). Reste maintenant à justifier ici la fonction de la préposition ‘de’, qui ne peut être alors une provenance (celui qui vient du-coq?) mais plutôt un métier (l’éleveur ou le vendeur de-coqs) ou plus sûrement une filiation, le terme s’appliquant alors ‘au (sous-entendu) fils de celui qui se prend pour un coq’, probablement un drôle de poulet…

Signalons au passage que les Coq ou Lecoq d’origine francophone ont exactement le même destin, tout comme les Jal, Jaud ou Jaux, termes patoisants directement adaptés du latin ‘gallus’ (il suffit de prononcer le ‘g’ initial de façon «mouillée» comme on le fait quand il est suivi d’un ‘e’, soit le son ‘j’). Nous voilà donc avec une pleine basse-cour de petits coqs, dont le diminutif rejoint justement l’idée d’un maquillage bariolé: celui qui se pare d’accessoires (multicolores ou pas) pour séduire la femelle, c’est un homme…coquet, bien sûr! Rappelons encore une fois à cette occasion que le ‘coq’ du ‘maitre cuisinier’ n’a rien à voir avec la poule (sauf au pot), mais qu’un maitre-coq, c’est un maitre-queux, ce second terme venant du verbe ‘cuire’ (to cook en anglais), et donc très loin de toute queu-e, même à plumes.

Il se peut que les Dehaene soient de temps en temps observés par des Dehaes, dont certains sont devenus Dehès ou Dehez en Gascogne et n’ont donc pas toujours une étymologie occitane). Ces Dehaes du Nord sont alors dans des clapiers, puisqu’il s’agit de lièvres (ou lapins; à une époque, c’est oreille-blanche et blanche-oreille), ce ‘haes’-ci étant à rapprocher du ‘hase’ allemand, et même de la…hase française! Je ne sais pas si notre Jean-Luc était un gros coq ou un chaud lapin, mais ce qui est sûr c’est qu’il savait parader, y compris étymologiquement.

(*) voir ce nom dans les archives
(**) un fidèle lecteur belge me signale que l’homme ne manquait pas d’humour: il collectionnait (et recevait en cadeau) toutes les formes de coqs possible. Heureusement qu’il ne s’appelait pas Dupont! (pardon, Verbrugge)


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