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Hécatombe

C’est le terme qui est en train de revenir en force à la Une des journaux, puisqu’on commence déjà à parler d’hécatombe, au sujet des prévisions les plus pessimistes sur la propagation du virus Ebola (1). Au-delà de la psychose (pas mal, également) de mauvais aloi entretenue par les (vraies) rumeurs (2), et dont il n’est pas question ici de négliger l’importance, on peut dire que, s’il ne s’agit «que» d’une hécatombe, cela n’est pas très grave. Rien de cynique dans cette affirmation: c’est seulement qu’elle ne concerne pas les humains.

En effet, comme il a été rapidement mentionné ici il y a quelques centaines de chroniques, ‘hécatombe’ est formé de deux mots grecs: ‘hékaton-‘, qui signifie cent (le chiffre) + ‘-be’, curieux résidu (en français) d’une racine issue du terme ‘bous’, qui désigne un boeuf. Ou une vache. Ou un veau. Ou un taureau; les grecs n’étant pas encore très fixés sur la nomenclature animale. D’ailleurs ‘bous’ va se transformer -graphiquement- en ‘bovs’ puis ‘bov-‘, ce qui permettra aux langues romanes de créer tout ce qui concerne (indifféremment) la racine…bovine, bovins et bovidés mélangés. Au moins étymologiquement.

Mais revenons à notre troupeau de vaches (ou de boeufs), dont les cent têtes contenues dans cette ‘hécatombe’ sont à prendre au sens figuré, en tout cas à notre époque. C’était un peu moins vrai au temps des Grecs qui, pour un certain nombre de sacrifices offerts aux dieux, se faisaient un devoir (et peut-être un plaisir, allez savoir) d’égorger cent bêtes; mais, rapidement, le nombre devint très approximatif et aussi symbolique que les ‘Trois Messes Basses’ de Dom Balaguère un soir de Noël au fumet d’oie farcie.

Voilà pourquoi, au fil des siècles, une hécatombe, qui était censée décrire à l’origine un carnage dans le pré, a peu à peu perdu de sa force pour évoquer un nombre ‘important’ de décès, en général accidentels…En effet, on ne parle pas d’hécatombe (mais de noble tradition) à la fin d’une saison tauromachique, même si l’on a passé par le fil de l’épée une liste équivalente de taureaux, pour lesquels, du coup, le mot serait tout à fait justifié. Paradoxalement, il est même tout à fait rare d’appliquer le terme à des animaux: quand vous avez vidé deux bombes anti-moustiques autour de la table du dîner pendant l’été, vous vous targuez rarement d’avoir fait une hécatombe; et encore moins si vous êtes l’un des derniers assassins d’éléphants d’Afrique ou de tigres du Bengale.

Apparaissant parfois à la suite d’un crash aérien particulièremenet meurtrier (même s’il n’y avait que 23 passagers à bord), le mot ne peut pas davantage s’appliquer au coup de sang meurtrier d’un gamin entrant dans une école muni d’une mitraillette (sauf à considérer les élèves comme des moutons, même simples ovins). Tout aussi indélicate a été l’utilisation de cette expression pour qualifier la mort de personnes âgées lors d’une canicule (‘Hécatombe dans les maisons de retraites’ titraient les journaux. Ah, les vaches!)…Il ne nous reste plus alors que la traditionnelle -et donc peu imaginative- ‘hécatombe’ d’automobilistes lors du grand chassé-croisé (3) des vacances, comme si l’on avait conduit à l’abattoir les victimes de la route (encore que…).

En conclusion, on peut donc dire que le virus Ebola ne saurait être à l’origine d’une hécatombe, ce dont se chargera bien l’ESB (Encéphalopathie Spongiforme Bovine) dans une étable, ou, au pire, un virus H1N1 dans un poulailler. Remarquez, dans le contexte humain, le mot a au moins une qualité, celle de donner bien involontairement raison à la désormais célèbre saillie du Général de Gaulle affirmant que «les Français sont des veaux». Sans compter les boeufs, encore plus nombreux que cent…

(1) voir aussi précédente chronique sur ‘panique’
(2) On ne dit pas ‘fausse rumeur’; une rumeur en soi est déjà fausse. Une fausse rumeur est donc une ‘vraie information’.
(3) Si une année vous lisez une autre expression, écrivez moi, d’autant qu’il faudrait alors parler de ‘transhumance’ (étymologiquement: changement de terrain)!


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