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Martin (Edouard)

Le très charismatique délégué CFDT de l’usine Arcelor-Mittal de Florange a déclaré sa candidature en tête de liste socialiste pour les prochaines élections européennes. De la lutte syndicale au combat politique, il y a un pas que notre Martin vient de franchir avec pugnacité, au risque tout de même de chercher le bâton pour se faire battre, pour ne pas dire fouetter. Le pire serait de prendre une veste -ou plutôt devrait-on dire un manteau- à l’occasion de ce scrutin. En fait, tout cela est très cohérent, y compris étymologiquement…

Première évidence, le patronyme Martin est depuis toujours (disons la fin du Moyen-Age) la superstar incontestée des registres d’Etat-Civil, largement devant les Bernard, Dubois, Thomas et Robert, pour ne citer que le top-five. Notons également l’explosion du mot en tant que prénom depuis les années 1980, à l’occasion d’un ‘revival d’authenticité et de simplicité’ (disent les gazettes). «Martin, pour un bébé, ça fait mignon», déclarait une jeune maman, en oubliant totalement qu’à l’origine, le terme est typiquement…guerrier.

Vous savez sans doute (ou vous vous doutez savamment) que nous devons la popularité de Martin à ce légionnaire romain du 4ème siècle, frappé par la grâce et la ‘douceur angevine’ au point de devenir un jour évêque de Tours, et sur lequel l’Eglise de l’époque fera une opération de communication majeure en faisant la promotion du premier produit ‘deux-en-un’ avec une histoire (très exagérée) de manteau découpé et donné aux pauvres (c’est malin, ça fait deux types qui ont froid en même temps sous une demi-couverture chacun)…Dans ce cas au moins, notre soldat portait bien son nom puisqu’à Rome, Martius est déjà un hommage à Mars, dieu de la guerre et déjà patron du premier (chez les Latins) mois de l’année, celui où il faut se battre contre l’hiver finissant pour ramener le printemps! Le mot aura encore quelques coups (de fusil) pour baptiser la juridiction de la guerre, la cour ‘marsiale’, ou le pas des militaires, qui défilent avec la même allure, cet adjectif devenant à son tour le prénom Martial évidemment.

Pendant que Martin s’en va-t-en guerre, et même en revient avec un surnom on ne peut plus clair («Le Retour de Martin Guerre» de Daniel Vigne, 1982), on applique la parité linguistique en créant la version féminine Martine, laquelle, à partir de 1954, sera tout juste autorisée à aller se balader ‘à la mer’, ‘à la montagne’, ‘à la campagne’, ‘au cirque’, ‘au zoo’, etc…La seule Martine guerrière que l’on connait à l’époque moderne a été localisée dans la région lilloise et mène le combat contre la Droite et ses dérive(é?)s. Le seul homme qui portera ce patronyme est allé pleurer sa solitude au bord d’un lac, il s’agit d’un certain Alphonse (de Lamartine).

Mais la famille ne s’arrête pas là: ce nom est tellement célèbre que plusieurs autres vont prendre racine dessus, dans à-peu-près toutes les langues: du Marti catalan au Marty toulousain, en passant par le Martinot bourguignon, le Martinod savoyard, le Martino corse, le Martini italien (à votre santé) et son diminutif Martinotti, sans oublier l’hôtelier cannois (Le Martinez). Cerise sur le manteau, Martin deviendra aussi le petit-nom d’un ours (à cause du parallèle entre la couleur du manteau du saint et le pelage du grognon), ainsi qu’un âne dans la tradition provençale (le plus souvent par confusion avec ‘l’âne de Martin’). Question bestioles, rajoutons au passage (en vol) le passereau aux plumes noires et brunes comme la robe des moines de Martin, le martinet, futur professionnel de la pêche (martin-pêcheur) ou de la chasse (martin-chasseur), histoire de rapporter du stock à Martinet (‘le traiteur intraitable’ de la télévision).

Non content de cette descendance prolifique, le martin passera également dans le langage commun, avec des résultats parfois inattendus: commençons par le martinage, cette ancienne redevance foncière que l’on devait payer le jour (ou dans la période) de la St-Martin. ‘Pire’ encore, la martinerie, nom de hameaux assez fréquent en Normandie par exemple, où se déroulaient les fêtes éponymes, pendant lesquelles on pouvait ‘martiner’, c’est-à-dire…se livrer à la débauche en l’honneur de la St-Martin, dans la ou les maisons à la réputation désormais entachée (ce n’est pas le cas des Martinières, rassurez ceux qui y habitent).

Le plus cinglant des Martin permet de boucler la boucle avec le martinet, instrument de punition que la légende chrétienne maniait avec dévotion en prétendant qu’il était fait à partir des lanières du fameux manteau (c’est plus un blouson, c’est un drap de lit!); il semble en réalité que le nom soit dû à une machine de guerre, sorte de catapulte à lanières, d’où la comparaison…Vous l’avez compris: il y en a qui devront sans doute se méfier de cet Edouard belliqueux, surtout étymologiquement!


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4 commentaires au sujet de Martin (Edouard)

  1. je vous félicite pour votre site, toujours très documenté et très plaisant à la fois. Je vous signale que beaucoup de journaux ont repris votre idée sur ‘martin guerre’. c’est vrai que les noms vous donnent souvent matière à des liens avec le sens on dirait qu’ils ont été écrits pour vous! continuez, nathalie de nice

  2. heu … Edouard Martin ?

    en réalité Eduardo Martín Benitez, espagnol né en Andalousie …

  3. Vous avez raison…J’ai préféré analyser directement la ‘version française’ des mots, tout à fait identique à l’état-civil andalou! Tout en n’en rajoutant pas avec ‘Benoit’ (Benitez); ce qui serait intéressant, ce serait justement de savoir quelles connotations aurait pu avoir le maintien de (tous le)s mots dans le contexte syndical…

  4. ben, Benitez, ça nous amène directement à la règle de St Benoît : Travail, Obéissance, Prière (de ne pas déranger pendant les heures de bureau).

    Edouard nous est donné comme déformation d’EadWard, qui serait un gardien des biens et des richesses. Ca convient parfaitement à un défenseur des droits acquis.

    pas moyen de trouver l’ascendance de ce Benitez là, le père et la mère sont inconnus des sites de généalogie. rien sur le Wiki espagnol. notre Edouard réussit dans son livre autobiographique à ne jamais donner les noms de ses parents ou grand-parents. on apprend juste que c’est son instituteur français qui a francisé son nom l’année de ses 8 ans. Aurions nous eu un député européen à l’état civil imaginaire?

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