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Négritude

Le 23 août dernier, vous n’avez pas manqué d’observer un moment de recueillement tout particulier en pensant à l’événement du jour, la commémoration de la «Journée-Internationale-du-Souvenir-de-la-traite-négrière-et-de-son-abolition» (ouf!). Bien que (très) discrètement relayée par des médias polarisés par le marronnier de l’année sur le prix de la rentrée scolaire (si on vous a rediffusé le reportage d’il y a quatre ans, vous n’y avez vu que du feu), un mot au moins a dû ‘choquer’ quelques personnes, ce ‘négrière’ que certain(e)s ne sauraient voir (ni lire)…

Par exemple, une chanteuse – peu spécialiste de la littérature anglaise- exprimait récemment sa rage devant le titre ‘raciste’ de l’oeuvre de la romancière britannique Agatha Christie ‘Dix Petits Nègres’, et souhaitait faire interdire la diffusion d’un épisode télé éponyme sur une chaine française! J’avoue, personnellement, être également scandalisé par l’agression sociale innommable à l’égard des ‘Misérables’ (V.Hugo), l’exclusion nationaliste suspecte appliquée à ‘L’Etranger’ (A.Camus), ou les traumatismes subis par le ‘Bossu de Notre-Dame’ à cause de son handicap et par le jeune ‘Poil de Carotte’ sauvagement stigmatisé en raison de sa roussitude (1).

De la même façon, et avec davantage d’efficacité semble-t-il, certains ont obtenu l’interdiction en pâtisserie des ‘têtes de nègre’, la censure du mot ayant quasiment partout fait disparaitre le gâteau, tout comme le dessert glacé appelé ‘nègre en chemise’, définitivement banni des menus! Bref, ‘nègre’, c’est pas bien, sauf, comme j’ai pris la précaution politiquement correcte de le mentionner en titre, s’il s’agit de faire l’éloge d’une culture ultramarine qui s’exprime sous la plume talentueuse d’Aimé Césaire, ou du génie littéraire d’un lauréat du Concours Général (métropolitain) devenu Président de la République (sénégalaise) sous le nez d’un autre (Président de la République -française- Georges Pompidou), Léopold Sedar Senghor (2). Comme quoi, les nègres en littérature n’ont pas toujours besoin d’eux-mêmes, tels ceux qui, travaillant dans l’ombre, sont forcément dans le noir, même s’ils sont blancs et parfois travaillent au noir…

La question fondamentale reste donc la suivante: les nègres sont-ils (vraiment) noirs; et pourquoi serait-ce mal? Les dérives de sens sont évidemment d’origine colonialiste (plutôt spécialement française d’ailleurs), les ‘pacificateurs’ se trompant totalement sur le sens du mot qui définit, jusqu’au 18ème siècle, une personne au teint mat, bronzé si vous voulez, tel qu’a pu le signifier l’adjectif ‘maure’, lequel, toujours à l’origine, n’a rien de strictement ‘arabe’ et pouvait tout aussi bien s’appliquer à un paysan du sud de la France largement exposé au soleil. Contrairement donc à ce que chantait Johnny, ‘noir c’est pas toujours noir’! Mais par la suite, la caricature a rapidement restreint le sens aux populations les plus ‘évidentes’ (= visibles).

Et cela ne s’arrange pas -linguistiquement parlant- avec le féminin ‘négresse’, aussi difficile à caser que ‘mairesse’ pour la première élue d’une ville, en raison d’une sonorité finale vécue comme agressive (donc péjorative). La langue pouvant être ‘la meilleure ou la pire des choses’ (Esope), le diminutif est à peine plus affectueux, avec un ‘négrillon’ qui, au mieux, fera rire les clients des cabarets de l’Entre-Deux-Guerres lors de numéros mettant en scène un ‘Art Nègre’ soi-disant reconnu comme mouvement artistique, surtout seins nus et ceinture de bananes à l’appui.

Remarquez bien que dans d’autres pays ce n’est pas mieux, depuis le ‘negro’ portugais jusqu’au ‘nigger’ américain qui, lui aussi, fera les belles séquences inoffensives des comédies musicales des années 1930 (tant qu’ils font des claquettes ou jouent de la trompette, les…Blacks sont encore acceptables; moins quand ils lèveront le poing sur les podiums olympiques);

Mais même si les langues sont parfois de vipère, elles peuvent aussi garder des traces plus positives: si ‘nègre’ a pu signifier pendant un temps ‘esclave’, comme le suggère l’intitulé de la Journée officielle, c’est que, forcément, il ‘travaillait comme un nègre’, c’est-à-dire beaucoup. Et ça, ca n’arrive pas toujours aux blancs, y compris étymologiquement!

(1) Si,si, ça existe (je veux dire le mot, aussi)!

(2) et non pas Léopold O’Cedar Senghor (je vous jure que je l’ai lu), Ocedar étant le nom d’une entreprise allemande spécialisée dans les produits d’entretien ménager depuis le milieu du 19ème siècle. No comment…


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