Benneteau (Julien)

Surprise quasi-générale (et à peine voilée) sur les courts du ‘Masters de tennis de Paris’: l’accession en demi-finale du «vétéran, français, bressan»( 1) Henri-Guy Desgrois, ses autres nom et prénoms! Le joueur professionnel au parcours parfois difficile selon les années de blessure se voit ainsi porté à la Une de tous les medias -au moins sportifs-, opportunité qui permet d’étudier l’origine de ce patronyme très…équivoque.

Pas équivoque en lui-même bien sûr mais par rapport à d’autres, puisque, du coup, beaucoup de lecteurs s’interrogent sur la possible parenté avec Bénéteau, la célèbre marque vendéenne de construction de bateaux à voiles (2). Sans parler d’un journaliste et présentateur connu, sur France Info et France 2, un certain…Julien Benedetto, lequel, pour rajouter à la confusion, est un ex-espoir (non confirmé) du tennis français des années 90! Alors?

Alors, pas du tout, ni pour l’un ni pour l’autre, ‘notre’ Julien n’a de point commun, linguistique ou familial, avec ces deux derniers. Et, pour une fois, la prononciation (et évidemment l’orthographe) du mot confirme une totale différence: on dit bien ‘Bènne(u)teau’ pour le tennisman (sans accent sur le premier ‘e’, avec les deux ‘n’, et le son ‘-eu-‘ au milieu), à la différence de Bénéteau et Benedetto (dont vous prononcerez tous les ‘e’ en ‘é’ puisqu’il s’agit d’un mot italien).

Le Bénéteau vendéen, tout comme Bénéteaud, éventuellement plus rarement Bénétaux, est une forme régionale poitevine de…Benêt en ‘français’, c’est-à-dire, comme en témoigne le circonflexe qui est resté sur le mot pour rappeler une (méga)contraction antérieure, une déclinaison du prénom Benoît, lequel est en fait un adjectif latin issu du mot ‘benedictus’ (c’est la syllabe -dic- qui s’est volatilisée en accent circonflexe) qui signifie évidemment ‘(celui qui est) béni’! Tous ces noms ‘de famille’ sont issus du ‘prénom’ qui fut autrefois un ‘surnom’ attribué le plus souvent en hommage à un Saint-Benoit (il y a en a au moins 8 de connus), dont le plus célèbre est l’inventeur, au 6ème siècle, de la fameuse ‘Règle’ de conduite monastique et néanmoins actuel Patron de l’Europe (qui en aurait bien besoin?).

C’est ce même ‘benedictus’ romain que l’on retrouve dans les très italiens (et corse) ‘Benetti’ ou ‘Benetto’ (dans le Piémont), ce dernier ayant pu gratifier sa descendance d’un ‘fils de Benoît’ devenu Benedetto, le nom de l’autre’ Julien, celui de la télévision. Notez qu’il existe aussi un cousin anglo-saxon avec Ben(n)ett, et même un autre germain qui se dit…Bentz. Le plus connu reste quand même le vénitien d’apparence très francophone qui se dit…Benetton, mais on va arrêter de tirer sur le fil de cette pelote.

Par comparaison, notre Benneteau va vous sembler bien ordinaire puisque cette orthographe si importante ici nous permet d’analyser le mot avec un suffixe ‘-eau’ lui aussi très caractéristique des noms qui ont fait souche dans le grand arc-atlantique, des Pays de Loire au sud de la Charente; quant à la racine qui précède, dont on conserve scrupuleusement les deux ‘n’, il s’agit tout simplement d’une référence à une…benne, autrement dit un chariot ou un tombereau.

En tant que noms communs, le benneteau de l’Ouest, le benneton ou le benazon (!) du Sud, et encore le benner de l’Est (bennair, en ‘parisien’) ont donc tous à voir avec un ancêtre ayant eu un rapport avec ce moyen de transport plutôt agricole, soit comme propriétaire, soit comme conducteur (les deux ne sont pas forcément liés), soit encore comme constructeur (ou réparateur) de bennes. Une bonne occasion pour notre champion du revers à deux mains d’en faire si possible des tonnes, au moins étymologiquement!

(1) faites votre choix (il a 35 ans et est né à Bourg-en Bresse)…

(2) et aussi de mobil-home et même de voiturettes électriques, depuis la diversification du groupe.

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