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Viennoiserie(s)

Parmi tous les jours fériés de ce mois de mai 2018, vous aurez peut-être l’occasion de faire un ‘matin paresseux’ anglais (grasse matinée en français, ou mieux réveil crapuleux) à l’occasion duquel quelqu’un vous apportera des croissants (un seul, ça fait radin). Et justement, mon toujours-au-boulot marchand de journaux (istambouliote!) me demandait, en ce premier mai, pourquoi toutes ces pâtisseries s’appelaient ‘viennoiseries’, lui qui ne connaissait de viennois qu’un empilement de crème industrielle foncée tournoyant sur l’écran de sa télé sous une blanche diarrhée de fausse chantilly de même facture…

Délicate réponse! Non pas sur la réalité historique -et géographique- de la chose, mais parce que, précisément, ses ancêtres compatriotes trempent directement non seulement dans le café mais aussi dans l’origine de la chose. En effet, la viennoiserie initiale n’est ni une brioche ni un pain aux raisins mais le-dit croissant, directement descendu du drapeau turc sur le plateau de lit de votre petit-déjeuner.

Enfin, quand je dis turc, je devrais dire ottoman, puisque (parait-il) l’affaire remonte à l’époque du grand empire dont le Magnifique Soliman restera la figure emblématique. Or, depuis la moitié du 14ème siècle, les Turcs occupent tout le pourtour sud de la Méditerranée, jusqu’à des incursions en Europe centrale où ils contrôlent par exemple l’actuelle Hongrie. Si Budapest est tombée, un peu plus au nord Vienne, elle, résiste; et ne voilà-t-il pas qu’en 1683, lors d’un second siège de la ville, les troupes du sultan lancent de nuit une attaque qu’ils espèrent définitive.

Mais, telle Rome avec ses oies du Capitole, Vienne avait aussi ses lanceurs d’alerte! Habillés de blanc comme les volatiles mais beaucoup plus loquaces, ce sont les boulangers matutinaux qui repèrent les intrus qui s’approchent, quittent leurs fourneaux et réveillent une population qui repousse les envahisseurs…En mémoire de ce jour, les mitrons autrichiens décidèrent d’immortaliser la fuite du ‘croissant turc’ en créant la pâtisserie (pas encore feuilletée) imitant la forme du symbole ennemi, d’où le nom…

Vous trouverez peut-être une version légèrement différente, mais toujours issue de la capitale austro pas encore hongroise, qui attribue cette fois à un cafetier local d’avoir servi le premier croissant (à peine gonflé) pour accompagner les sacs de café oubliés par les fuyards; mais dans les deux cas, les Turcs n’ont pas eu le temps de finir leur tasse avant de se retirer en nombre…décroissant.

Dernière étape du petit roulé à deux cornes: c’est à la reine Marie-Antoinette, ci-devant citoyenne surnommée à juste titre ‘l’Autrichienne’, que l’on doit semble-t-il le transfert du croissant jusqu’à Paris (puis Versailles, natürlich), d’où le terme définitif de viennoiserie, littéralement donc ‘les gâteaux qui…viennent’ d’où vous savez. Mais figurez-vous que le succès n’a pas été immédiat, car il a fallu attendre que le peuple ait fini de ‘manger de la brioche’ (*): si l’on trouve les premières ‘boulangeries viennoises’ dans le Paris de 1830, il n’y a qu’un siècle plus tard qu’il sera devenu l’apéritif anticipé de l’hostie dominicale.

Quant au croissant, celui du drapeau turc (et symbole fréquent de la zone musulmane, avec l’étoile et la couleur verte de l’Islam), il reproduit évidemment l’une des phases de la lune (‘dos à droite’ donc pas du tout croissante mais en fait décroissante!), une forme déjà utilisée des millénaires auparavant par les Egyptiens et quelques autres peuples du Moyen-Orient pour lesquels ils servaient de marquage…sur le bétail.

Alors, si vous voulez mettre votre croissant dans le bon sens sur la table, il faut orienter les pointes vers la gauche, afin de constater que la lune croît (avec un circonflexe car elle grandit, elle ne croit en rien) à mesure que le vide de votre estomac décroît (il diminue). Croyez-moi ou non…

(*) citation tout à fait improbable attribuée à la Reine; et quand bien même, c’eût été une façon de dire ‘autre chose que du pain’ (noir) et non pas une ironie déplacée de Sa Majesté raccourcie.

COMPLEMENT 2020

Quant au nom de la ville lui-même (il faut quand même être sérieux), il n’a rien – mais rien du tout – à voir avec l’allemand ‘wein’, en tous cas au sens de…vin, sauf à en rendre rouge de honte le Danube bleu. Tout comme pour la ville de l’Isère ou la rivière du Poitou puis, par conséquent, le département français, la racine est formée des deux mots d’influence gauloise ‘uindo’ + ‘bona’, soit la ville brillante (probablement, à chaque fois, le reflet des flots). Dans le cas français, ‘Uindobona’ s’est transformé en Vindobona puis Vindenna, et enfin Vienne. Du côté plus germanico-autrichien, le mot évolue en Winbonna puis se contracte en…Wien, ce qui fera de l’endroit une « belle ville » dès le 10ème siècle.

Au cours de l’histoire (très) mouvementée des confettis de territoires qui exploseront à tour de rôle au milieu du continent européen de la fin de l’Empire de Charlemagne (ou, au moins de Charles-Quint) jusqu’à l’éphémère Empire austro-hongrois, Vienne restera la capitale du pays le plus à l’est de l’Europe, pour lequel on crée le surnom de ‘territoire de l’Est’, soit « osten-reich », le royaume oriental, transformé en Österreich en langue locale, alors que le français sous influence latine (Austria) en fera l’Autriche. Voilà pour les précisions; il fallait bien que ça vienne…


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Un commentaire au sujet de Viennoiserie(s)

  1. c’est du meilleur,ironique et léger,le croissant de Soliman

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