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Hurluberlus

…il y a encore des gens qui savent doser le niveau de leur vocabulaire, voire remettre en lumière quelque terme devenu désuet comme ‘sauvageons’ (l’ex-ministre Jean-Pierre Chevènement, en 1999) ou huluberlu, délicat qualificatif récemment utilisé par le maire de St-Gervais (Haute-Savoie) au sujet des inconscients qui s’attaquent à l’ascension du Mont-Blanc en baskets (entre autre).

Mal préparés, inconscients du danger et éventuellement agressifs, ces randonneurs sont-ils des ‘huluberlus’? A l’intention des lecteurs étrangers de plus nombreux (1) – francophiles mais parfois surpris par nos racines linguistiques – disons que ce mot, qui résonne comme une onomatopée (quatre ‘U’ comme turlututu), vient d’un assemblage de deux parties (hurlu-berlu, ça se devine facilement) dont on…ne connait pas l’origine.

Alors forcément, de nombreuses hypothèses – pour ne pas dire légendes – circulent à ce sujet. Mais comme, malgré tout, on possède plusieurs attestations écrites de son utilisation à travers les siècles, il y a quelques pistes intéressantes; disons d’abord que ce drôle de terme se retrouve sous différentes formes, comme ‘hurlubrelu’ ou ‘hurluburlu’ dans des textes du 16ème siècle, pour décrire des situations…abracadabrantesques ou des personnes en état de confusion mentale, agissant « estourdiment et sans connoissance ».

On trouve même un pseudo St-Huluberlu chez Rabelais, avec une connotation sonore aussi moqueuse et ironique que pourra l’être un certain roi Ubu au théâtre plus tard (2). Or, cet hulu-berlu aurait principalement deux provenances possibles, l’une française, l’autre anglaise, les deux empruntées au vocabulaire médiéval de chaque langue donc peut-être un tout petit peu suspectes.

Commençons par le français, dont la partie ‘hurlu-’ pourrait venir d’une contraction de ‘hurelu’ (hure-lu), nom commun désignant une personne ‘à la tête de hure’, c’est-à-dire littéralement la tronche des sangliers. Le terme ‘hurel’ a effectivement pu désigner, temporairement, un homme aux cheveux hérissés et durs comme le poil de la bête (ou, pourquoi pas, au visage écrasé comme un groin), puis, par extension, un grognon et ‘mauvais coucheur’ pour ne pas dire mal réveillé (d’où les cheveux en bataille).

Plus terrible est la seconde partie ‘-berlu’, puisqu’il a existé un verbe d’ancien-français comme ‘berluer’, que l’on a souvent défini comme être ébloui – d’où le participe passé (être) éberlué – ou voir mal, même très mal sans doute, et pour cause: la ‘berle’ en question était le globe oculaire; un ‘éberlué’ était donc un homme énucléé (auquel on avait arraché un oeil), on comprend que ça le fasse…hurler (?!), autre hypothèse à rapprocher de ‘hurlu’.

Question hurluberlus, les Anglais sont également sur les rangs (étymologiques, bien sûr), avec deux racines sérieuses formant un ‘hurly-burly’ de l’époque shakespearienne; ‘hurly’ exprimait un bruit ou une confusion provoquée par un coup violent ou le jet d’un objet; ‘burly’ ne serait qu’une redondance sonore du premier segment, encore une onomatopée comme le hully-gully, cette danse des années 1960 où le corps se secouait (3)?  

Seule constatation à peu près régulière: il s’agit toujours de situations ou de personnages excentriques, semblant agir instinctivement sans préparation ni plan particulier. De quoi, on le comprend, faire hurler les guides professionnels de montagne; y compris peut-être étymologiquement!

  1. Dans l’ordre cette semaine: Belgique, Canada, Suisse, Etats-Unis, Algérie, Allemagne, Maroc, Angleterre 
  2. ‘Ubu roi’ d’Alfred Jarry (1896) 
  3. Le mot est emprunté à l’expression ‘hull da gull’, où un joueur secouait des noix dans sa main pour faire du bruit…

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