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Week-end à Tulle

A défaut de ‘week-end à Rome’, le président de la République a bien le droit d’un moment de tranquillité ‘sur ses terres’ (1). A défaut de nouveau nom étymologiquement intéressant dans une actualité écrasée par tous les Cahuzac possibles, voici un petit rappel actualisé (2), sollicité par plusieurs lecteurs, au sujet de la ville en question.

La préfecture de la Corrèze semble avoir un nom familier mais néanmoins étrange; il est pourtant totalement exemplaire d’un point de vue historique et étymologique. En effet, l’origine de la ville remonte à l’époque de l’occupation romaine, jusqu’ici rien de bien original. Comme pour le reste de leur culture, les Romains apportaient leurs traditions, leur langue, leurs techniques, et leur(s) religion(s), lesquelles, c’est bien connu, foisonnent de dieux, déesses, demi-dieux et autres héros, bâtards et monstres divers engendrés par Jupiter et sa clique.
Dans cette région du nord de l’Occitanie (3), il y a des rivières particulièrement encaissées (dont la fameuse et future Corrèze), qui se trouvent en plein milieu d’un itinéraire romain de longue distance qui allait de la Méditerranée à la Bretagne. Or, chez les Latins, dès qu’il y a un site un peu merveilleux, bizarre, ou en l’occurrence hostile et dangereux (Jules César va s’y ‘casser les dents’ lors d’une virée), il y a tout de suite un dieu de service sous la protection duquel il faut mettre l’endroit en question; c’est le cas d’une divinité (ou plus exactement, d’un type, d’un niveau de divinités) que l’on convoque pour consacrer et sécuriser le franchissement de ces torrents furieux, à savoir un certain Tutela, puissance à laquelle on confiait la sécurité des personnes et surtout des lieux. La preuve, les « dieux qui protègent la maison » sont des dieux…tutélaires! (même mot que le français « tutelle », qui signifie, précisément, « mettre sous la protection de quelqu’un »).
En occitan, l’étymologie du mot ‘Tulle’ est encore plus transparente que l’eau de la Corrèze, puisque cela se dit ‘Tula’, même si la tradition du Grand Sud traduit ce terme par « la ville aux sept collines », sorte de slogan publicitaire de l’époque, à défaut d’une traduction littérale. Mais il suffit de se rendre au pied de la cathédrale Notre-Dame pour comprendre le pourquoi de la chose; sans compter que l’expression aurait largement fait plaisir au pouvoir de l’Empire d’occupation (c’est aussi le surnom de Rome).
Bref, pour traverser les trois kilomètres de méandres qui serpentent dans la cité, les habitants ne faisaient pas dans la dentelle, sans savoir que c’est justement ce qui fera le succès puis la renommée de la ville quelques siècles plus tard, mais pas seulement: Tulle, capitale de l’accordéon (l’entreprise Maugein), de la carabine (manufacture d’armes), et donc de la dentelle, ce tissu fait avec des brins de fil en coton ou soie, d’une minutie de motifs que l’on surnommera ‘les petites dents’, les dentelles. Il donnera également son nom à un vêtement très prisé par les petits rats: en effet, les petites filles en chausson rose vont très vite surnommer le voile de leur justaucorps le ‘Tu-tu(lle)’, à cause de la ressemblance avec les petits trous de la dentelle, tout en y appliquant un redoublement infantile (tu-tu) qui évitera de le confondre avec le (vrai) tulle.

On peut se féliciter que l’industrie du tissu en question se soit installée dans la ville en question et non chez sa grande rivale, Brive (le ‘bri-bri’, à l’Opéra, c’est pas évident). Le derby corrézien ne date pas d’hier: depuis toujours, les populations des cités ont le génie pour parler (ou médire) de leurs voisines: ne disait-on pas en Corrèze, «Brive la Gaillarde, Tulle la…Paillarde», bien avant l’invention des collerettes érectiles des danseuses prépubères?

(1) La puissance de la suggestion médiatique étant ce qu’elle est, notre bon François ‘de Corrèze’ n’en est pas moins de naissance (haute-)normande: Rouen. Tout comme un certain Jacques Chirac d’ailleurs, né à …Paris!
(2) Première édition, février 2011. A compléter par un coup d’oeil sur ‘Hollande/Trierweiler’, pour être tout à fait précis.
(3) Le Limousin a été pendant longtemps la zone la plus ‘haute’ des langues d’Oc, terre des troubadours, regroupant le gascon, le languedocien, le provençal, entre autres…


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