Le site qui vous aide à comprendre le vrai sens de votre patronyme

…a remis un moment à la Une le nom de cette commune de Haute-Garonne, dont le plus célèbre résident et néanmoins conseiller général de canton fut l’(ex) Premier Secrétaire général du Parti socialiste Lionel Jospin. L’élégant mais énigmatique toponyme pose question à de nombreux lecteurs, hésitant entre une ‘belle…quelque chose’, ou ‘une quelqu’une en…ceinte’ (!), quand ce n’est pas carrément une méga-erreur d’orthographe d’une supposée Cinte (Sainte) Gabelle, comme le laisse supposer la graphie occitane sur l’image d’en-tête.

En bien si! Comme toujours, il faut faire confiance aux langues locales ou régionales qui ont précédé (et donc inspiré) le français de Paris, langue unique et centralisée décrétée comme ciment de la République par nos anciens ministres de l’Education. Il fut un temps pas si lointain où réprimandes et châtiments corporels attendaient les élèves qui ’s’oubliaient’ dans la cour de récréation en parlant le breton, le basque ou l’alsacien (entre autres).

Manifestement, les choses ont l’air d’être claires: la mention occitane en ‘Senta Gabèla’ étant la plus fiable, on peut comprendre (ou imaginer?) sans hésiter que le ‘cinte-‘ de l’écriture française est l’adaptation du très régulier et fréquent ‘sènt’ (au masculin) pratiqué dans tout le sud du pays…S’il y a(vait) donc une Sainte Gabelle, on doit bien en trouver trace quelque part, et c’est là que le bât blesse; tout ce dont on est à peu près certain, c’est que le mot est apparu à la fin du 10ème siècle, et qu’il se dit que l’évêque de Toulouse – le religieux est toujours une sommité à cette époque – avait confié à l’un de ses subordonnés la garde de l’église Ste-Marie où reposaient les restes de la-dite Sainte Gabelle, dont…on ne sait toujours rien.

Moins légendaire peut-être, pour ne pas dire carrément prosaïque, est l’explication très technique apportée par plusieurs linguistes qui commencent par s’appuyer, eux, sur la gabelle, terme relativement connu qui désigne une taxe sur les denrées entrée en vigueur au Moyen-Age, la plus connue étant le sel. Le mot français est emprunté à l’italien ‘gabella’ (même sens), lui-même formé sur…l’arabe ‘qabàla’ qui veut dire impôt. Du coup, double et même triple question: notre village n’étant certainement pas le seul a avoir été soumis à cette charge, pourquoi ne retrouve-t-on pas le même raisonnement dans de nombreux autres sites? Le cas échéant, en quoi la gabelle locale était-elle particulière? Et surtout, que faire désormais de cette ‘cinte’ ou ‘senta’ devenue bien encombrante et à tout le moins peu logique? Sans compter que la taxe en question n’est répertoriée dans les registres que deux à trois siècles plus tard…

Et si, pour une fois, la forme actuelle ‘cinte-‘ était la plus plausible, car elle peut être une transposition quasi-identique du latin ‘cincta’, participé passé d’un verbe qui signifie entourer, et particulièrement nouer avec une lie, pour ne pas dire…cein(c)turer! C’est exactement l’image qui pourrait s’appliquer à un travail des champs très ordinaire dans la France du millénaire: partant du principe que ‘gabèla’ existe également en occitan sous la forme ‘gavèla’ (avec une alternance b/v très commune), on arrive alors à l’ancien français ‘javelle’, c’est-à-dire une gerbe de blé que l’on n’a plus qu’à ‘ceindre’ (nouer) avec une autre tige pour fermer la botte et stocker le faisceau!

Dans tous les cas, d’accord ou pas, on ne saurait reprocher aux Cintegabellois(e)s de s’être donné un petit coup d’espoir en se créant un ‘hagiotopnyme’ (un nom de lieu basé sur celui d’un saint); après tout, rien de mieux que d’invoquer le Ciel quand il s’agit de préserver les ressources de la Terre. Même étymologiquement!

…telle est en effet la pensée plus ou moins ‘arrière’ des déçus de l’élection présidentielle. Belle occasion pour se pencher (sans tomber) sur ce petit mot courant dans notre langue, en forme de bienvenue pour nos nouveaux et lointains lecteurs francophones (1), ce qui n’empêche pas de questionner également les Français: vous aussi, sauriez-vous dire tout de suite, exactement (et sans tricher) quelle est la racine et le tout-premier sens de ce mot ? Prenez quelques secondes avant de baisser les yeux…

Revanche, revanche…Où avez-vous vu une histoire de revanche pour la dernière fois ? Sur l’affiche d’un film d’extraterrestres? Celle du retour de Zorro ou de Trinita ? Il est vrai que la chose a des côtés…revanchards ou plutôt, étymologiquement, revendicatifs. Car le radical qui a donné naissance à la revanche est le verbe latin ‘revendicare’, qui exprime la volonté de porter un préjudice en justice pour obtenir réparation; l’action s’accompagnant de comportements en général assez violents, son but est donc finalement de faire punir le coupable après avoir…revendiqué son droit.

Quelques siècles plus tard, une fois passé au moulinet des langues romaines à romanes pour arriver à notre ‘ancien-français’, on retrouve le verbe ‘revencher’, toujours avec ce préfixe ‘re-’ qui marque l’insistance (on re-vient se plaindre); d’ailleurs, dans ‘revenche’, il y a ‘venche’, qui va devenir ‘venge’ (et donc le verbe venger) puis forcément ‘vengeance’ et ‘vengeurs’ à la suite, nobles notions dont s’enorgueillit l’un des hymnes nationaux les plus sanglants (et sanguinaires), ‘La Marseillaise’ (2).

Voilà qui explique sans doute les assauts pour le moins vindicatifs des partisans de tous bords. Etymologiquement, la revanche est donc une forme de vengeance; maintenant que vous savez, faites-en bon usage. A charge de revanche, bien sûr! 

(1) Welcome, Hong-Kong, Algérie et…Népal! 

(2) « Amour sacré de la patri-i-e, conduis, soutiens nos bras vengeurs…» (6ème strophe, celle que vous ne chantez jamais).

…celui de ‘Peau d’Ane’ et de tant d’autres moments magiques du cinéma français vient de disparaitre; c’est l’occasion de lui rendre hommage et de rappeler la provenance simple de ce patronyme, qui est en fait un matronyme, le nom de scène de Jacques-André Perrin-Simonet étant en réalité celui de sa mère. D’un point de vue étymologique, l’acteur était donc défini par quatre ‘prénoms’ pour l’Etat-civil: Jacques, André, Simon (diminutif,  Simonet) et Pierre, la pierre sur laquelle est bâtie Perrin et tant d’autres dérivés.

Perrin est effectivement une variante de Pierrin, qui a rapidement disparu pour des raisons de prononciation, tout comme une autre forme de Perrier, théoriquement dit Pierrier auparavant (*); Perrier fera donc beaucoup plus de bulles par la suite, tout comme les Perret -le chanteur Pierre- à la place des Pierret. Néanmoins, Pierret, Pierron, Pierreau et évidemment l’ami Pierrot continueront à se maintenir, quand les habitudes des parlers régionaux le permettront.

Pour les Perrin, qui auront le plus de chances de faire souche dans l’Est de la France (des Ardennes au Lyonnais), le nom est perçu dès la fin du Moyen-Age comme un diminutif, plus spécialement qualifié d’affectueux et dit ‘hypocoristique’. Ce terme un peu barbare et en tous cas difficile à caser tous les matins à la machine à café vient du grec et évoque quelque chose doux, une façon de caresser la personne que l’on désigne en lui adressant une intention de gentillesse.

Dans la vie courante, c’est plus ou moins l’origine de tous les surnoms ridicules dont vous gratifiez vos proches (Doudou, Chouchou, mon Minou, etc…) mais également de ceux qui vont finalement être considérés comme de ‘vrais’ noms de famille, tels Pierrot (le petit Pierre), Bernadette (la fille de Bernard), Micheline (la femme de Michel) etc…en utilisant divers suffixes qui exprimeront la marque du-dit diminutif.

Du côté des Perrin, la version féminine Perrine va rester dans l’Histoire – au moins les histoires de fin de banquet – à cause d’une servante qui va se planquer avec son amant dans une huche à pain pour échapper au curé, puis elle-même donner à la suite non seulement le prénom féminin mais aussi tous les Perrinet, Perrineau, Perrinaud, Perrinot et même Perrinelle, tous plutôt dans l’Ouest de la France, de la Vendée à la Seine-Maritime. Quant à la version simplifiée de Pierrette (trop compliqué de tout articuler dans certains patois), elle deviendra Perrette dans une fable où une bergère hystérique renverse la traite du matin, c’est vache M. De La Fontaine…

Le clin d’oeil étymologique du jour est aussi statistique : comment imaginer que c’est un Perrin qui interprètera pour la postérité un personnage créé, à quelques siècles d’écart, par un certain…Perrault (Charles), lui-même version très Val-de-Loire du nom qu’un Jacques marquera d’une…pierre blanche dans le cinéma français.  

(*) Essayez de répéter plusieurs fois les deux ‘i’ à la suite…

…les échanges d’idées démocratiques. Enfin, théoriquement. Parce que le débat est très rarement -et souvent pas du tout- un dialogue, encore moins une discussion et surtout pas une conversation (1), mais plutôt un affrontement entre deux débatteurs. Or, dans ‘batteur’, il y a aussi…battu, ce qui veut bien dire qu’on cherche toujours qui a gagné et qui a perdu lors de ce débat (2).

D’ailleurs, le verbe débattre est un composé du verbe…battre,  c’est-à-dire frapper, et plutôt violemment ou à coups répétés. Les autres dérivés du mot ne sont pas moins utiles (et significatifs): lors d’un débat, il s’agit bien d’a-battre son adversaire, de le com-battre, de lui ra-battre (le caquet) voire de re-battre (les cartes sur tables), et même de…s’é-battre avec lui (ou elle) sur le plateau (3).

Tout ça à cause d’un écrivain latin (4), auteur de ‘comédies à sandales’ comme on disait à l’époque, plus ou moins de la comédie ‘de boulevard’ aujourd’hui. Or, dans le latin classique, il y avait plusieurs mots pour dire battre, selon que l’on frappait à plat de la main, avec un gourdin ou vec une épée (en transperçant);  bref, lui utilisa plutôt pour la scène le terme vulgaire (=commun) de ‘battuere’, d’où la forme française.

C’est ainsi qu’on vit naitre dans la langue aussi bien le battant (la partie du volet qui cogne contre le mur), le battage et la batteuse (pas encore moissonneuse), le battement (du cil supérieur qui se croise avec le cil inférieur), la batterie (de cuisine au 13è siècle, puis de musique plus tard), le battoir (la plaque qui frappe le linge), la battue (quand on…bat la campagne pour trouve un sanglier ou un fugitif), la bataille (le moment où on va frapper un ennemi) et même la…batte, à beurre ou de base-ball, pas besoin de vous expliquer le fonctionnement.

Mais revenons à nos débats, ou plutôt à notre débat que les Anglais appellent ‘debate’, avec un sens beaucoup plus restreint que les Français puisqu’il désigne précisément les ‘sujets à discussion’ portés devant le Parlement et qui font l’objet d’une délibération officielle. Notez au passage que l’Assemblée Nationale française (de 1789) lui avait à l’origine donné le même sens, avant l’intrusion de la télévision dans l’hémicycle et les séances de théâtre du mercredi après-midi.

Reste encore une dernière variante à ce mot, apparue très furtivement au 12ème siècle et abandonnée pendant le Moyen-Age, c’était celle d’un dilemme ou d’une ‘hésitation mélancolique’ (sic) due à un combat…intérieur avant de prendre une décision. Comme quoi, on peut sans doute encore débattre avec soi-même jusque dans l’isoloir. Les débats sont ouverts…

(1) Etymologiquement et successivement: entretien parlé à deux (dia-logue), échange d’arguments contradictoires (dis-cussion) ou partage de propos plus personnels (con-versation).

(2) Sauf dans les partis politiques, où le (la) champion(ne) a toujours fait mieux que lors de la dernière fois.

(3) Contrairement à l’usage habituel devenu presque exclusif, on ne s’ébat pas toujours dans son bain ou dans une rivière en compagnie de jeunes personnes…

(4) Plaute (254-184 av. JC)

…parfois même sans trop lui demander son avis: il suffit pour cela de se revendiquer comme « soutenu(e) par le peuple », même si ce n’est qu’une fraction d’un pourcentage d’une partie des inscrits sur les listes électorales qui ont bien voulu s’exprimer, bref ça ne fait pas beaucoup et sûrement pas ‘tout’ un peuple…

Il n’empêche, le peuple a bon dos mais pas toujours bonne presse, y compris étymologiquement; la preuve, c’est que dans la famille (en tous cas française), il y a d’abord et logiquement la ‘population’ c’est-à-dire, comme l’entendaient les Romains, « l’ensemble des habitants d’un lieu »; puis ce qui est ‘populaire’, soit, le plus souvent, ce qui plait au peuple (selon que ça s’applique à une banque, à un Front social ou à une émission de variétés à la télévision, les commentaires seront différents); on trouve également le ‘populisme’, notion pas très appréciée des intellectuels qui voudront éviter ce piège dans lequel tombe la…’populace’ (dérivé affublé d’un suffixe quasiment dégueulasse), la masse de ceux qui se pressent dans les endroits ‘populeux’ (gavés de monde) le samedi après-midi.

Il n’y a guère que le monde artistique qui respecte ses spectateurs (et néanmoins clients) en transformant le mot (« y’a du peuple dans la salle, ce soir ») en…public, forme un peu plus complexe mais dérivée de la même racine latine que les autres soit ‘populus’ (1). Avec ce même respect (ou hypocrisie?), l’Etat romain fera du public son partenaire institutionnel pour gouverner avec le Sénat (2) et même un système politique en créant ‘la chose publique’ soit en latin « res publica » devenue la ‘république’ française. 

Mais revenons à nos moutons (si j’ose dire), toujours pas sortis de quelques idées préconçues sur l‘intelligence des foules; pendant longtemps, il y avait d’ailleurs dans l’échelle sociale pire que le peuple, déjà en bas de l’échelle, c’est le ‘bas-peuple’ (sous le premier barreau), celui pour lequel on construira au début du 20ème siècle des ‘Maisons’ qui, à défaut d’être closes, seront souvent fermées aux non-militants du Parti. Au mieux, avec un brin de condescendance à condition qu’il soit gentil, on l’appellera ‘le petit-peuple’ et ça ira comme ça. On n’aura qu’à lui donner quelques religions pour l’occuper, que certains n’hésiteront pas à qualifier « d’opium du peuple » (Karl Marx).

Or, plus d’un siècle auparavant, la presse écrite avait déjà fait sa révolution en publiant « L’Ami du Peuple » (rédacteur en chef, le fan de baignoire Jean-Paul Marat). Par ailleurs, le dernier qui a voulu faire du sentiment avec les gens en se proclamant « le Petit Père des peuples » ne les a pas vraiment pris dans ses bras puisqu’il se nommait Joseph (Djougatchvili) Staline…Sans parler du ‘peuple maudit’ (le plus souvent les Juifs en exode) ou du ‘peuple élu’ (les mêmes!).

La racine latine aura en tous cas eu beaucoup de succès à travers l’Europe puisqu’à la suite immédiate du ‘populus’ latin, on trouve le très attendu ‘popolo’ italien; puis le ‘pueblo’ espagnol un peu plus sonore, le ‘popor’ roumain, et même le ‘people’ anglais avec lequel rivalisera le ‘peuple’ germain sous la forme ‘Volk’ en allemand (et néerlandais, et suédois) concédé aux Saxons d’Angleterre dans un ‘folk’ avec un ‘f’ un peu plus sec.

Finalement, le seul peuple qui a (vraiment) de la branche est un homonyme du précédent, mais que les Latins prononçaient avec un accent tonique plus long, du style ‘pôôpulus’, ce qui a donné ‘pouple’ temporairement en vieux-français, puis ‘peupl…ier’, soit le nom d’un arbre forcément très populaire, sauf étymologiquement!

(1) populus > pobulus > poublus > public

(2) « Senatus populusque romanus » (regardez dans ‘Astérix’)